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Réduction de la teneur en soufre du carburant diesel routier au Canada

Document de travail sur l'élaboration du règlement canadien en vue d'une harmonisation avec la nouvelle norme américaine, Mai 2001

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1. Introduction

Environnement Canada élabore de nouvelles normes concernant la teneur en soufre admissible du carburant diesel utilisé dans les véhicules routiers. En vue d'une harmonisation avec les nouvelles normes de l'Environmental Protection Agency (EPA) américaine, le Canada limiterait la teneur en soufre de son carburant diesel routier à 15 parties par million (ppm) au maximum à compter du milieu de 2006. Le présent document de travail examine les options qui s'offrent quant au processus d'élaboration et à la structure du nouveau règlement canadien sur le carburant diesel.

Plus précisément, Environnement Canada demande l'avis des parties intéressées sur la structure et le processus d'élaboration du règlement canadien visant à réduire à 15 ppm la teneur en soufre du carburant diesel routier à partir de 2006. Les enjeux particuliers sur lesquels Environnement Canada recueille des opinions sont énumérés à la section 5.

Les options de base pouvant servir à l'élaboration du règlement peuvent être ramenées aux deux approches suivantes :

  1. un règlement simple établissant que tout le carburant diesel routier utilisé au Canada devra contenir au plus 15 ppm de soufre à compter du 1er juin 2006;
  2. un règlement complexe du même genre que celui de l'EPA avec des dispositions offrant certains assouplissements de sorte qu'une petite partie du volume total de carburant diesel routier pourrait dépasser la limite de 15 ppm pendant une courte période de transition.

En plus des nouvelles exigences relatives au carburant diesel routier à faible teneur en soufre, Environnement Canada prévoit aussi élaborer un nouveau règlement pour les véhicules lourds et les moteurs lourds.

1.1 Contexte

Les émissions des véhicules et des moteurs sont les principales causes de la pollution atmosphérique au Canada. La pollution atmosphérique qu'elles engendrent a d'importantes répercussions négatives sur la santé des Canadiens, provoquant des décès prématurés, des troubles cardio-vasculaires et des problèmes respiratoires.

En collaboration avec les gouvernements provinciaux, le gouvernement fédéral met en place un programme complet pour des véhicules et des carburants moins polluants dans le but de réduire les émissions nocives des véhicules. Les mesures prises au cours des dernières années comprennent une réglementation fédérale visant à réduire le niveau acceptable d'émissions de gaz d'échappement, d'émissions par évaporation et d'émissions en cours de ravitaillement des nouveaux véhicules routiers, à limiter la teneur en soufre du carburant diesel, à réduire la concentration de benzène dans l'essence et à limiter le débit des pompes à essence. De plus, un règlement adopté en 1999 réduira la teneur en soufre de l'essence à compter de 2002 et sera intégralement appliqué d'ici la fin de 2004. La plupart des provinces réglementent la pression de vapeur de l'essence et certaines élaborent ou ont déjà mis en place des programmes d'inspection et d'entretien et des programmes de mise à la ferraille des véhicules.

Dans le cadre du programme pour véhicules et carburants moins polluants, le ministre fédéral de l'Environnement a annoncé en mai 2000 et de nouveau en février 2001 que les normes canadiennes sur le soufre dans le carburant diesel routier seraient synchronisées et harmonisées avec les exigences en voie d'élaboration aux États-Unis. Le 7 décembre 2000, cet engagement a été renouvelé lorsque le gouvernement du Canada et celui des États-Unis ont signé une entente sur la réduction des mouvements transfrontaliers de polluants causant le smog (l'Annexe sur l'ozone1). Dans cette entente internationale, le Canada s'engage à « Élaborer et mettre en uvre [...] un règlement, en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement 1999, visant à réduire le niveau acceptable de soufre dans les carburants diesels à usage routier, en s'alignant sur les futures normes américaines. »

Le 21 décembre 2000, les États-Unis ont publié leur règlement final établissant les normes d'émissions pour les moteurs lourds et les véhicules lourds ainsi que les exigences relatives à la teneur en soufre dans le carburant diesel routier2. Le programme de l'EPA réduira les niveaux d'émissions de particules et d'oxydes d'azote de 90 % et de 95 % respectivement par rapport aux normes actuellement en vigueur. Les émissions de monoxyde de carbone, de dioxyde de soufre et de substances toxiques comme le benzène, le butadiène-1,3, le formaldéhyde, l'acétaldéhyde, l'acroléine et les dioxines seront également réduites.

Le règlement final des États-Unis fixe à un maximum de 15 parties par million (ppm) la teneur en soufre du carburant diesel utilisé dans les véhicules routiers. La limite de 15 ppm prend effet le 1er juin 2006. Le règlement américain constitue un document volumineux et complexe, car il comprend des dispositions dites de « soupape de sécurité » permettant que pour une faible partie du volume total de carburant diesel des États-Unis, on continue d'appliquer la norme actuelle, soit une limite de 500 ppm, pendant une courte période.

1.2 Consultations menées jusqu'à présent sur la réglementation canadienne

En avril 2000, Environnement Canada a invité les intervenants à participer à l'élaboration du programme fédéral pour des véhicules, des moteurs et des carburants moins polluants. La liste des enjeux englobait toutes les exigences concernant la teneur en soufre du carburant diesel routier et les échéanciers afférents.

D'après les résultats des consultations, les intervenants appuient presque à l'unanimité l'harmonisation des normes canadiennes avec les exigences des États-Unis concernant la teneur en soufre du carburant diesel routier. Parmi les intervenants qui favorisent cette harmonisation, mentionnons l'Institut canadien des produits pétroliers, la Compagnie pétrolière impériale Ltée, Sunoco, Petro-Canada, North Atlantic Refining, le District régional du Grand Vancouver, la Manufacturers of Emission Controls Association, la Commission d'hygiène de Toronto, l'Alliance canadienne du camionnage et l'Association canadienne des constructeurs de véhicules. Quelques intervenants ont demandé que la teneur en soufre admissible soit inférieure à 15 ppm (p. ex. Volkswagen et les Ami(e)s de la Terre). Husky Oil, qui appuie l'harmonisation et la synchronisation avec les normes américaines relatives au carburant, a indiqué qu'elle « ne peut atteindre le niveau de 15 ppm envisagé pour le soufre sans effectuer d'importants investissements en capitaux » et a recommandé un niveau de 50 ppm.

Dans une lettre à Environnement Canada datée du 13 décembre 2000, l'Institut canadien des produits pétroliers a réitéré son engagement à appuyer l'harmonisation générale avec les normes américaines concernant le carburant diesel routier, y compris la limite relative à la teneur en soufre.

Le 17 février 2001, le ministre fédéral de l'Environnement a publié le Programme pour des véhicules, des moteurs et des carburants moins polluants sous forme d'Avis d'intention dans la Partie I de la Gazette du Canada3. Aux termes de cet Avis d'intention, « Environnement Canada propose de synchroniser et d'harmoniser ses normes avec le niveau final de soufre contenu dans le carburant diesel routier aux États-Unis... Le processus canadien de réglementation sera amorcé sous peu, avec un document de travail sollicitant les opinions des intervenants concernant le besoin et la nature des provisions « soupape de sécurité » semblables à celle contenues dans le règlement final américain. » (Le présent document est le document de travail mentionné.)




Notes de bas de page

1 Protocole entre le gouvernement du Canada et le gouvernement des États-Unis modifiant l'« Accord entre le gouvernement du Canada et le gouvernement des États-Unis d'Amérique sur la qualité de l'air ». 7 décembre 2000.
2 Gouvernement des États-Unis. "Control of air pollution from new motor vehicles: heavy-duty engine and vehicle standards and highway diesel fuel sulfur control requirements; final rule". U.S. Federal Registry, vol. 66, no 12, p. 5001-5194, 18 janvier 2001.www.epa.gov/fedrgstr/EPA-AIR/2001/January/Day-18/a01a.htm
3 Ministre de l'Environnement. Programme fédéral pour des véhicules, des moteurs et des carburants moins polluants. Gazette du Canada, Partie 1, le 17 février 2001, p. 452-457

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2. Sommaire du règlement final américain sur la concentration de soufre dans le carburant diesel routier

Le règlement final américain4 réduit la limite actuelle relative à la teneur en soufre du carburant diesel routier, la faisant passer de 500 ppm à 15 ppm. La limite de 15 ppm prend effet le 1er juin 2006 dans les raffineries et aux points d'importation. Pour permettre que le carburant diesel produit ou importé juste avant cette date soit acheminé dans le réseau de distribution, la date d'entrée en vigueur dans les terminaux de stockage en vrac du diesel est fixée au 15 juillet 2006, et dans les installations de vente en gros et au détail, au 1er septembre 2006. Aux termes du règlement américain, le carburant diesel d'importation et le carburant diesel utilisé pour la recherche et pour certaines applications militaires ne sont pas assujettis aux exigences relatives à la concentration de soufre. C'est aussi le cas du diesel employé au Guam, dans les Samoa américaines et dans les Îles Mariannes du Nord.

2.1 Dispositions prévoyant une soupape de sécurité en matière d'approvisionnement

En fixant les exigences relatives au diesel, l'EPA devait relever un défi, soit garantir que le carburant diesel à 15 ppm de soufre serait largement accessible partout aux États-Unis tout en veillant au maintien d'un approvisionnement général adéquat en carburant diesel routier. À cette fin, l'EPA a prévu certains assouplissements s'appliquant à une petite partie du volume total de carburant diesel routier pendant une période de transition d'une durée de 3 ans et demi à 4 ans. En 2010, à la fin de cette période de transition, tout le carburant diesel routier devra être conforme à la limite de 15 ppm.

Les principaux assouplissements, dits « soupape de sécurité », prévoient qu'entre juin 2006 et décembre 2009, donc pendant la période de transition, un raffineur ou un importateur pourra conserver une teneur en soufre supérieure à 15 ppm dans un volume de carburant diesel routier équivalent au maximum à 20 % du volume total annuel de l'entreprise. (La teneur en soufre de ce carburant devra être conforme à la limite actuelle, soit 500 ppm.) De plus, un raffineur ou un importateur peut créer un déficit maximal de 5 % (c.-à-d. produire jusqu'à 25 % de carburant diesel routier ayant une teneur en soufre supérieure à 15 ppm) pendant une année, mais il doit effacer ce déficit l'année suivante (p. ex. en produisant moins de 15 % de carburant diesel routier ayant une teneur en soufre supérieure à 15 ppm).

Il est important que la disposition de l'EPA concernant ce volume de 20 % soit assortie d'un programme régional de cumul et d'échange de crédits d'émissions de soufre. Entre juin 2006 et décembre 2009, les raffineurs et les importateurs peuvent générer un crédit d'émissions de soufre pour chaque gallon de carburant diesel routier à 15 ppm produit en surplus des 80 % de leur production totale de carburant diesel routier. En outre, des crédits d'émissions de soufre peuvent être produits entre juin 2005 et mai 2006 pour chaque gallon de diesel à 15 ppm vendu comme carburant diesel à 15 ppm, et entre juin 2001 et mai 2005, pour chaque gallon de diesel à 15 ppm utilisé dans un moteur ou un véhicule satisfaisant aux exigences de 2007 concernant les émissions (cette dernière disposition est très restrictive et peu susceptible de donner lieu à de nombreux crédits).

Des crédits d'émissions de soufre peuvent être accumulés pour utilisation future ou échangés avec d'autres parties. Jusqu'à décembre 2009, les crédits d'émissions de soufre pourront être utilisés pour satisfaire à l'exigence relative à la proportion de 80 % du volume total de la production formée de carburant diesel à 15 ppm, y compris pour effacer un déficit. Ils pourront aussi servir à prolonger la période de production ou d'importation de carburant diesel à 500 ppm jusqu'à mai 2010. Les crédits ne peuvent être échangés que deux fois (pour que l'EPA puisse suivre efficacement les échanges) et doivent être utilisés dans le même PADD5 (districts d'approvisionnement en produits pétroliers) des États-Unis où ils sont produits. Tous les crédits viendront à expiration le 1er juin 2010.

2.2 Autres dispositions et assouplissements

En plus des dispositions prévoyant une soupape de sécurité, le règlement américain contient un certain nombre d'autres assouplissements qui seront effectifs pendant la période de transition. Ces derniers s'appliquent surtout aux petites raffineries.

Assouplissement pour les petites compagnies de raffinage

Le règlement américain sur le diesel, tout comme le règlement américain sur le soufre dans l'essence, définit les petites compagnies de raffinage comme étant celles où travaillent moins de 1 500 employés à la grandeur de l'organisation et dont la capacité de traitement du pétrole brut est inférieure à 155 000 barils par jour. Les raffineries appartenant à une compagnie qui répond à cette définition ont comme alternative de :

  • retarder jusqu'au 1er juin 2010 l'application de l'exigence relative à la limite de 15 ppm pour le carburant diesel routier et obtenir des crédits d'émissions de soufre pour tout diesel à 15 ppm produit pendant la période de transition;
  • retarder l'application du règlement américain sur la concentration de soufre dans l'essence pendant une période allant jusqu'à deux ans à condition de produire uniquement du diesel à 15 ppm à compter de juin 2006.

Assouplissement pour les raffineries des États des Rocheuses

Aux termes du règlement final américain sur la teneur en soufre de l'essence (adopté en décembre 1999), les raffineries de sept États des Rocheuses disposent d'un sursis pour se conformer aux exigences relatives à la teneur en soufre de l'essence. Par conséquent, en l'absence de dispositions spéciales dans le nouveau règlement américain sur le diesel, ces raffineurs auraient dû réduire la teneur en soufre de l'essence et du diesel presque en même temps. Le règlement américain sur le diesel accorde donc aux raffineries des Rocheuses deux années supplémentaires pour se conformer aux exigences américaines relatives à l'essence, à condition qu'elles ne produisent que du carburant diesel à 15 ppm à compter de juin 2006.

Il convient de noter que les exigences canadiennes relatives à la concentration de soufre dans l'essence seront appliqués entièrement à partir de la fin de 2004; il n'y a donc pas de chevauchement avec la date d'entrée en vigueur fixée à 2006 pour le carburant diesel à 15 ppm.

Assouplissement pour l'Alaska

L'Alaska, contrairement aux autres États, utilise seulement une petite quantité (environ 5 %) du mazout léger total dans les véhicules routiers alimentés au diesel. Actuellement, l'Alaska bénéficie d'une exemption en regard de la limite fédérale qui fixe à 500 ppm la teneur en soufre du carburant diesel routier.

L'Alaska devra se conformer à la nouvelle limite de 15 ppm. Cependant, aux termes du règlement américain, le gouvernement de l'Alaska peut présenter une demande afin d'être autorisé à élaborer un programme spécial pour l'introduction du diesel à 15 ppm. Les dispositions du règlement fédéral américain sur le diesel s'appliqueront en Alaska à moins que cet État présente une demande pour un programme spécial d'ici avril 2002 et que l'EPA approuve cette demande.

Assouplissement pour fardeau financier extrême

Aux termes du règlement américain, tout raffineur déclarant qu'il aurait à supporter un fardeau financier extrême s'il appliquait les exigences relatives à la teneur en soufre du carburant diesel peut présenter à l'EPA une demande pour obtenir plus de flexibilité pendant la période de transition. Dans ce genre de demande, le raffineur doit autoriser l'EPA à consulter ses états financiers. Si cette dernière approuve la demande, le raffineur peut retarder l'application de l'exigence relative à une teneur en soufre de 15 ppm dans le carburant diesel jusqu'à la date approuvée par l'EPA, date qui ne peut pas dépasser juin 2010. D'après l'EPA, cette disposition s'appliquera à moins de 1 % de la production totale de carburant diesel routier aux États-Unis.

Le tableau ci-dessous résume les dates associées aux divers assouplissements qui s'appliquent pendant la période de transition.

PériodeSoupape de sécuritéAutres assouplissements
Juin 2001 à mai 2005
  • Crédits pour utilisation précoce de diesel à 15 ppm dans des moteurs de l'année automobile 2007
  • Avril 2002 - date limite à laquelle l'Alaska peut s'inscrire à un programme spécial
Juin 2005 à mai 2006
  • Crédits pour les ventes précoces de diesel à 15 ppm
 
Juin 2006 à décembre 2009
  • Entrée en vigueur de la limite de 15 ppm pour le carburant diesel
  • une proportion de 20 % de carburant diesel à 500 ppm peut être produite et importée
  • Crédits pour la portion de diesel à 15 ppm dépassant 80 % du volume total de carburant diesel routier
  • Cumul et échange de crédits autorisés
  • 100 % de diesel à 15 ppm pour les petits raffineurs et les raffineries du GPA (Geographic Phase-in Area) qui choisissent de retarder l'application des exigences relatives à l'essence
  • Début du programme spécial pour l'Alaska, s'il est accepté
Janvier 2010 à mai 2010
  • Cumul de crédits terminé
  • Échange de crédits permis
  • Crédits utilisables pour continuer à produire et à importer du diesel à 500 ppm
 
À compter dejuin 2010
  • 100 % du carburant diesel à 15 ppm
  • Expiration de tous les crédits
  • Diesel à 15 ppm pour les petits raffineurs
  • Adoption obligatoire du carburant à 15 ppm par les raffineries ayant supporté un fardeau extrême



Exemptions de courte durée pour circonstances imprévues

En plus des dispositions ci-dessus qui ne s'appliquent que pendant la période de transition, le règlement américain sur le diesel prévoit aussi des exemptions temporaires, de courte durée, en cas de circonstances imprévues (c.-à-d. actes de Dieu). Un raffineur qui obtient cette exemption doit compenser tout déficit relatif à la qualité de l'air et remettre au gouvernement tout avantage économique découlant de la dérogation accordée. Des dispositions dérogatoires semblables sont également inclues dans le règlement de l'EPA sur la teneur en soufre dans l'essence.

Le volet économique intégré aux dispositions dérogatoires du règlement américain est un facteur majeur pour prévenir les abus potentiels des compagnies, qui pourraient modifier l'équilibre concurrentiel sur le marché. La Californie n'a pas prévu de pénalités économiques dans ses dispositions concernant les dérogations lorsqu'elle a introduit le diesel à 500 ppm en 1993 et elle a constaté que ces dispositions étaient utilisées à mauvais escient. Par la suite, cet État a intégré une pénalité de 15 cents américains le gallon pour l'essence produite en vertu d'une dérogation dans son règlement de 1996 sur l'essence de Phase 2. Jusqu'à présent, le seul raffineur qui s'était vu accorder une dérogation (ou « variance » comme on l'appelle en Californie) ne l'a pas utilisée, car il a trouvé d'autres moyens de fournir de l'essence, évitant ainsi une pénalité financière.

2.3 Exigences en aval

Le règlement de l'EPA aura pour effet la coexistence de deux qualités de carburant diesel routier (c.-à-d. 15 ppm et 500 ppm) sur le marché américain pendant la période de transition. Le carburant diesel à 15 ppm doit être utilisé dans les nouveaux véhicules (ceux qui seront produits après l'année automobile 2007). Par conséquent, le règlement américain comporte de nombreuses exigences complexes visant à prévenir le ravitaillement des véhicules avec un carburant contre-indiqué et la contamination du carburant diesel à 15 ppm. Le règlement américain impose une séparation des deux qualités de diesel et le suivi (au moyen de documents de transfert du produit) de chaque lot de carburant diesel dans le réseau de distribution du carburant.

Le règlement américain comprend des dispositions visant à régler le problème lié au risque de contamination du carburant diesel à 15 ppm dans le réseau de distribution du carburant diesel. Le règlement permet de déclasser dans le réseau de distribution un lot de carburant diesel à 15 ppm et de le désigner comme du carburant à 500 ppm en modifiant les documents d'accompagnement. Aux termes du règlement américain, une personne peut déclasser jusqu'à 20 % du volume de carburant diesel qu'elle gère pendant une année. Il existe aussi une tolérance autorisée de 2 ppm pour les mesures effectuées aux points situés en aval de la raffinerie et du point d'importation.

Pour diminuer les risques d'incidents dus au ravitaillement des véhicules nouveaux avec un carburant à teneur élevée en soufre, le règlement prévoit aussi (assez en détail) les exigences en matière d'étiquetage pour les pompes de distribution. Toutes les pompes doivent indiquer précisément la qualité de carburant diesel, à savoir faible teneur en soufre, teneur élevée en soufre, ou carburant diesel hors route. L'EPA a décidé de ne pas imposer de restrictions sur le diamètre du pistolet, ni de coloration du carburant, ni d'autres exigences en matière de ravitaillement (du moins pour le moment). L'organisme a plutôt décidé de miser sur les facteurs susceptibles de dissuader les conducteurs d'utiliser le mauvais carburant (p. ex. dommage à l'équipement, problèmes liés à la garantie, responsabilités, coûts) afin de réduire au minimum le ravitaillement avec un carburant contre-indiqué.

Dans l'ensemble, en permettant la coexistence d'une nouvelle qualité de carburant diesel sur le marché du carburant diesel routier pendant la période de transition, le règlement américain est nécessairement devenu complexe et lourd à cause des problèmes à gérer en aval.




Notes de bas de page

4 On peut consulter le règlement américain et les documents d'appui à l'adresse suivante : www.epa.gov/otaq/diesel.htm
5 Petroleum Administrative Defence Districts : 1 - East Coast, 2 - Midwest, 3 - Gulf Coast, 4 - Rocky Mountains, 5 - West Coast.

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3. Constatations de l'EPA

La documentation de l'EPA sur son règlement comprend une foule d'informations à l'appui du programme sur les véhicules lourds et des exigences connexes relatives à la teneur en soufre du carburant diesel. Une découverte clé en ce qui a trait à la réduction de la teneur en soufre du carburant diesel routier, c'est que les nouvelles normes d'émission des véhicules lourds au diesel « ne peuvent être réalisées sans une modification au carburant ». D'autres constatations importantes de l'EPA sont résumées ci-dessous.

3.1 Avantages et coûts

Les avantages des nouvelles normes pour les véhicules lourds et des exigences connexes sur la teneur en soufre du carburant diesel sont très importants. D'après les constatations de l'EPA, les avantages l'emportent sur les coûts dans une proportion de 16 pour un.

Le programme concernant les véhicules lourds vise principalement à réduire les émissions de NOx et de PM10. En plus de ces réductions, les émissions de monoxyde de carbone (CO), d'oxydes de soufre (SOx), de composés organiques volatils (COV) et de substances atmosphériques toxiques seront également réduites de façon importante. Lorsque le programme des véhicules lourds sera entièrement mis en application (vers 2030, quand le parc de véhicules sera complètement renouvelé), les réductions annuelles d'émissions seront importantes, comme l'indique le tableau ci-dessous.

PolluantRéduction des émissions en 2030 (tonnes impériales)Pourcentage de réduction lié au parc de véhicules lourds
NOx2 570 00087%
PM10109 00073%
CO1 290 000~90%
SOx142 000~97%
COV115 00025%
Substances toxiques17 00025%

Ces réductions d'émissions auront elles-mêmes des effets très positifs sur la santé des Américains6, comme l'indique le sommaire ci-dessous:

Effet sur la santéRéduction en nombre de cas par année une fois la mise en uvre du programme terminée (vers 2030)
Décès prématurés8 300
Admissions à l'hôpital7 100
Visites à l'urgence2 400
Nouveaux cas de bronchite chronique5 500
Nouveaux cas de bronchite aiguë chez les enfants17 600
Crises d'asthme360 000
Symptômes respiratoires chez les enfants386 000
Jours d'absence au travail1,5 millions

L'EPA a estimé que le coût annualisé de son programme sur les véhicules lourds sera de 3,6 milliards de dollars américains pour l'année 2010. On prévoit que le carburant diesel à faible teneur en soufre coûtera entre 4,5 cents et 5 cents américains le gallon, soit entre 1,8 et 2,0 cents canadiens le litre7 (sans compter des économies de un cent américain le gallon découlant de l'entretien des véhicules).

L'EPA a souligné que sa décision d'autoriser la vente sur le marché d'un certain volume de carburant diesel routier à teneur élevée en soufre pendant la période de transition entraînera des coûts importants pour les exploitants de pipelines et les propriétaires d'installations de stockage. En d'autres mots, une partie des coûts liés au respect du règlement est transférée des raffineurs aux entreprises de transport et de mise en marché du carburant diesel. Cependant, l'EPA pense que le réseau actuel peut supporter la coexistence de deux qualités de carburant diesel routier de façon restreinte pendant la période de transition.

3.2 Approvisionnement en diesel

Dans le règlement présenté en mai 2000, l'EPA proposait simplement une limite de 15 ppm entrant en vigueur en 2006. Les raffineurs américains et le département américain de l'Énergie se sont alors dits très inquiets des effets de ce règlement sur l'approvisionnement général en carburant diesel routier aux États-Unis. C'est pourquoi l'EPA a ajouté des assouplissements du genre « soupape de sécurité » dans le règlement final.

Dans ce règlement final, l'EPA a déclaré que l'approvisionnement serait suffisant même si tout le carburant diesel routier devait avoir une teneur en soufre de 15 ppm en 2006. Grâce aux dispositions du genre « soupape de sécurité », l'EPA a conclu que l'industrie du raffinage (des États-Unis) a amplement les capacités nécessaires. Si le niveau des assouplissements était supérieur à 20 %, certaines régions des États-Unis pourraient manquer de carburant diesel à 15 ppm. Étant donné la flexibilité du programme de cumul et d'échange de crédits, l'EPA pense que la plupart des raffineurs américains choisiront soit de produire uniquement du carburant diesel routier à 15 ppm ou à 500 ppm et que plus de la moitié des raffineries (probablement les plus petites) retarderont les investissements en immobilisations dans une certaine mesure en achetant des crédits d'émissions de soufre.

3.3 Technologie de raffinage

L'EPA a déterminé qu'il n'est pas nécessaire de recourir à de nouvelles techniques de raffinage pour se conformer à la norme de 15 ppm; cependant, on travaille actuellement à la mise au point d'une nouvelle technologie qui peut réduire les coûts dans une proportion pouvant atteindre 25 %. L'EPA a constaté que tous les raffineurs seront techniquement en mesure de respecter la norme de 15 ppm grâce à des variantes de la technique classique de l'hydrotraitement, la même qui est actuellement utilisée pour se conformer à l'exigence de 500 ppm. Environ 20 % des raffineurs américains investiront probablement dans de nouvelles unités d'hydrotraitement à deux étapes au lieu de moderniser leur équipement actuel.

3.4 Pouvoir lubrifiant

En ce qui a trait au pouvoir lubrifiant et aux effets possibles du diesel à faible teneur en soufre sur les moteurs actuels, l'EPA a fait les constatations suivantes :

"Il y a de l'incertitude quant à l'impact que pourrait avoir la norme de 15 ppm de soufre sur le pouvoir lubrifiant du carburant. D'après certains éléments de preuve, le procédé classique utilisé pour éliminer le soufre du carburant diesel, l'hydrotraitement, peut modifier le pouvoir lubrifiant selon l'importance du traitement et les caractéristiques du brut. Étant donné que les raffineurs miseront probablement sur l'hydrotraitement pour respecter la limite imposée relativement au soufre, il pourrait y avoir une diminution de la concentration des composantes du carburant diesel qui contribuent à assurer un pouvoir lubrifiant adéquat. Par conséquent, le pouvoir lubrifiant de certains lots de carburants pourrait être plus faible comparativement aux niveaux actuels, ce qui nécessiterait un emploi accru d'additifs lubrifiants dans le carburant diesel routier".

L'EPA a décidé de ne pas inclure de prescriptions concernant le pouvoir lubrifiant dans son règlement sur le diesel à faible teneur en soufre, et de favoriser plutôt une démarche volontaire. Cependant, l'EPA a fixé le coût des additifs lubrifiants à 0,2 cents américains le gallon dans ses estimations générales des coûts. Une compagnie pétrolière (BP-Arco) a déclaré qu'elle tient compte du pouvoir lubrifiant dans tous ses produits et qu'elle poursuit ses efforts en vue d'obtenir un pouvoir lubrifiant idéal tant du point de la performance que du coût8. On s'attend que d'autres compagnies emboîteront le pas..

3.5 Gestion des pipelines

L'EPA s'est penchée sur la façon dont il faudrait gérer les pipelines afin de réduire au minimum la contamination du carburant diesel à faible teneur en soufre par d'autres carburants (à teneur beaucoup plus élevée en soufre). L'EPA a conclu qu'il y aurait une gestion plus serrée des pipelines, notamment un volume plus important de produits d'interface et des volumes accrus de lots contaminés et mélangés à nouveau. Le tableau ci-dessous présente les estimations de l'EPA concernant les coûts liés aux autres problèmes de gestion de ces pipelines et du réseau de distribution9.

Répartition des coûtsCoûts de distribution(en cents US par gallon pour tout le carburant diesel routier fourni)
Mise en uvre du programme terminée(à partir de 2010Période initiale(2006-2010)
Coût de la distribution du volume supplémentaire requis pour compenser la réduction de la densité énergétique du diesel à 15 ppm0,170,14
Coût du déclassement d'un volume additionnel de diesel à 15 ppm en un produit de moindre qualité pendant le transport par pipeline0,140,10
Coûts accrus pour le volume actuel de carburant diesel routier qui doit être déclassé dans le réseau pipelinier0,090,08
Coûts accrus pour le déclassement du volume d'interface entre les envois par pipeline de carburant diesel routier et de carburéacteur ou de kérosène, et son reclassement comme carburant hors route0,070,03
Coût des essais approfondis au terminal0,0020,002
Coût des réservoirs supplémentaires pour le stockage des volumes d'interface des pipelines entre les expéditions de carburéacteur et de diesel à 15 ppmComplètement amorti pendant la période initiale du programme0,009
Coûts du déclassement des volumes d'interface associés aux envois par pipeline de carburant diesel routier à 500 ppm pendant la période initiale du programmePas de coût supplémentaire0,004
Coût des réservoirs supplémentaires dans les raffineries, les terminaux, les dépôts de stockage en vrac et les relais routiers pour la gestion de deux qualités de carburant diesel routier pendant la période initiale du programmeComplètement amorti pendant la période initiale du programme0,7
Coût de l'optimisation du réseau de distribution en vue de limiter la contamination par le soufre0,0250,027
Total (en cents US/gallon)0,51,1
Total (en cents canadiens/litre)0,20,4

L'analyse de l'EPA révèle que près de la moitié des coûts de distribution sont liés au fait d'avoir une deuxième qualité de carburant diesel routier. La plus grande partie des autres coûts de distribution correspond à des frais courants découlant des problèmes de contamination.

Au Canada, la situation diffère de celle qui prévaut aux États-Unis du fait qu'au moins une compagnie pipelinière canadienne (Trans Mountain) envoie du pétrole brut et d'autres produits pétroliers dans le même pipeline. Le pétrole brut peut avoir une teneur en soufre plus élevée que la plupart des produits pétroliers; cependant, le mazout lourd contient autant ou davantage de soufre que le pétrole brut.




Notes de bas de page

6 L'annexe A fournit une comparaison entre les avantages découlant de l'ensemble du programme sur les véhicules lourds et le carburant pour les États-Unis et des estimations pour le Canada fondées uniquement sur la réduction de la teneur en soufre du carburant diesel routier.
7 L'annexe B fournit une estimation des coûts pour les raffineurs canadiens calculés selon diverses méthodes.
8 "ULSD supply, demand spreading much wider across the U.S." Diesel Fuel News, 19 février 2001, p. 3.
9 Source : Regulatory impact analysis for the U.S. diesel sulphur rule, EPA-420-R-00-026, chapitre V, page V-124, table V.C-26.

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4. Enjeux et options pour le Canada

4.1 Enjeux liés à la réglementation

Les consultations menées en vue de l'élaboration de l'Avis d'intention pour des véhicules, des moteurs et des carburants moins polluants ont montré que tous les intervenants appuient l'harmonisation des normes canadiennes relatives à la teneur en soufre du carburant diesel avec les exigences américaines à ce chapitre. Dans l'Avis d'intention, le gouvernement fédéral a confirmé qu'il adopterait cette approche. Environnement Canada élabore donc un règlement visant à limiter la teneur en soufre du carburant diesel routier à un maximum de 15 ppm à compter du 1er juin 2006.

Aux États-Unis, la plus grande partie (> 80 %) du carburant diesel routier contiendra moins de 15 ppm de soufre à partir de 2006. Pendant la période de transition, une deuxième qualité de carburant diesel contenant 500 ppm de soufre sera offerte en petite quantité aux États-Unis. Dans l'ensemble, en permettant la coexistence d'une qualité supplémentaire de carburant diesel sur le marché du carburant diesel routier pendant la période de transition, le règlement américain devient nécessairement très lourd et complexe à cause des problèmes à régler en aval.

Permettre l'utilisation d'une deuxième qualité de carburant diesel routier au Canada se traduirait par les mêmes préoccupations et la même complexité qu'aux États-Unis, soit la contamination du carburant diesel à faible teneur en soufre et les risques de ravitaillement des véhicules avec un carburant à teneur élevée en soufre. Aux États-Unis, l'EPA a réglé ces problèmes au moyen de nombreuses dispositions prévoyant la séparation des produits, le suivi de chaque lot, l'étiquetage à la pompe et un procédé complexe de déclassement. En général, toutes ces exigences ont pour effet de refiler les coûts d'application du règlement aux entreprises de stockage et de distribution du carburant (par exemple, les pipelines et les camions-citernes).

Il y a une question d'ordre juridique qui se pose uniquement au Canada. L'EPA fonctionne dans le cadre d'un système juridique qui lui laisse un grand pouvoir discrétionnaire pour l'établissement des normes relatives aux carburants, mais la législation canadienne est plus restrictive quant aux assouplissements qui peuvent être prévus dans le règlement sur les carburants. Il est peu probable que le règlement canadien adopté en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, 1999 (LCPE, 1999) puisse inclure tous les types d'assouplissements accordés aux raffineurs et aux exportateurs dans le règlement final américain sur le carburant diesel. Ainsi, Environnement Canada s'est engagé à harmoniser son règlement avec le règlement américain sur le carburant diesel routier, mais la réglementation canadienne devra respecter le cadre juridique et les dispositions habilitantes établies dans la LCPE, 1999.

La principale question qui se pose (compte tenu des contraintes législatives existant au Canada) est donc la suivante : le Canada devrait-il inclure au règlement certains assouplissements autorisant les compagnies à produire et à importer un faible volume de carburant diesel routier non conforme à la norme de 15 ppm pendant une courte période de transition? En d'autres mots, le règlement du Canada sur la teneur en soufre du carburant diesel routier doit-il être harmonisé avec les exigences américaines qui s'appliquent à la plus grande partie (plus de 80 %) de son carburant diesel routier (soit 15 ppm en 2006), ou doit-il comprendre des assouplissements semblables à ceux du règlement américain (dans la mesure du possible dans la LCPE, 1999)?

Le tableau ci-dessous résume les avantages et les désavantages de ces deux options.

 Harmonisation avec les exigences applicables à au moins 80 % du carburant diesel routier des É.-U.Harmonisation avec les assouplissements intégrés au règlement final américain (dans la mesure du possible
Type de règlementsimple, 15 ppm en juin 200615 ppm en juin 2006, assorti d'assouplissements semblables à ceux des États-Unis
Avantages
  • règlement simple (probablement par la modification de l'actuel Règlement sur le carburant diesel)
  • exigences administratives simples
  • pas de problèmes de ravitaillement avec le mauvais carburant
  • ne devrait pas avoir de répercussions négatives sur les exigences concernant la mise en réservoir
  • exigences minimales pour les grossistes et les détaillants
  • flexibilité pour les raffineurs et les importateurs
  • atténuation des inquiétudes relatives à l'approvisionnement
Désavantages
  • inquiétudes possibles concernant
  • higher initial costs for refiners
  • nouveau règlement complexe
  • nombreuses exigences administratives, y compris pour les grossistes et les détaillants
  • problèmes de ravitaillement avec le mauvais carburant
  • problèmes de distribution et coûts liés à la coexistence de deux qualités de carburant, notamment les réservoirs additionnels
  • nombreux problèmes d'ordre juridique et d'application du règlement

L'annexe C fournit un cadre éventuel de réglementation pour les deux options.

Parallèlement à la question théorique fondamentale qui consiste à déterminer si le règlement canadien devrait contenir des assouplissements comparables à ceux des États-Unis, d'autres questions (plus techniques) se posent, en particulier si l'on décide d'accorder ce type d'assouplissements.

Une série de questions traitent des inquiétudes relatives à la contamination et au ravitaillement en carburant contre-indiqué. Devrait-on autoriser le « déclassement » au Canada? Si oui, comment faudrait-il s'y prendre? Quels types de documents devront accompagner un lot de carburant diesel à faible teneur en soufre dans tout le réseau de distribution? Dans le contexte canadien, l'étiquetage à la pompe suffit-il à éviter le ravitaillement avec un carburant contre-indiqué? Faut-il colorer le carburant?

Il faut aussi se demander s'il serait efficace de créer un programme d'échange de crédits d'émissions de soufre au Canada étant donné le petit nombre de raffineurs et d'importateurs au pays. Aux termes du règlement américain, les crédits d'émissions de soufre doivent être utilisés dans la région où ils ont été produits. Il y a sept régions définies par le règlement américain, soit les cinq PADD (districts d'approvisionnement), l'Alaska et Hawaii. Dans la plupart de ces régions, il y a plus de raffineries qu'il n'y en a dans tout le Canada. Pour garantir l'accessibilité au carburant diesel à faible teneur en soufre dans les régions au Canada, il faudrait que les échanges soient limités à l'échelle régionale. Les régions canadiennes seraient probablement établies en fonction des secteurs généraux d'approvisionnement des raffineries, soit l'Ouest, l'Ontario et l'Est. Il existe présentement six raffineries (plus Suncor) qui produisent du carburant diesel routier dans l'Ouest, cinq en Ontario (en plus des installations de lubrification de Petro-Canada), et six dans l'Est. Il y a un certain nombre de questions à examiner en ce qui a trait à un éventuel programme canadien d'échange de crédits. Y a-t-il suffisamment de raffineries dans ces régions pour qu'un programme d'échange de crédits soit efficace? Faudrait-il envisager d'autres regroupements régionaux? Comment pourrait-on concevoir le programme canadien d'échange de crédits pour s'assurer que le carburant diesel à faible teneur en soufre serait distribué partout au Canada pendant la période de transition? Quels sont les problèmes liés à la compétitivité en ce qui a trait à l'échange de crédits d'émissions de soufre dans des marchés relativement petits?

La distribution du carburant dans l'Arctique comporte certains aspects uniques. Souvent, il n'y a qu'une seule expédition de carburant par année dans certaines collectivités nordiques. Il peut s'avérer difficile, sinon impossible, d'y acheminer du carburant en hiver. Pour ces raisons, et parce que le délai entre la finalisation du règlement et l'entrée en vigueur de la norme relative à la teneur en benzène au point de vente (22 mois), le Règlement sur le benzène dans l'essence prévoit neuf mois de plus pour l'application de la norme sur le benzène au point de vente dans l'Arctique (ailleurs au Canada, cette période supplémentaire était de trois mois comme dans le règlement américain sur le diesel). Cependant, le Règlement sur le soufre dans l'essence adopté au Canada ne prévoit pas de période supplémentaire pour l'application du règlement dans l'Arctique, à cause du délai plus long séparant la finalisation du règlement et l'application de la limite relative au soufre au point de vente (54 mois), ainsi que de la nature des dispositions provisoires relatives à la moyenne de 2 ans et demi. Les compagnies devraient disposer d'environ 48 mois entre la finalisation du règlement sur le carburant diesel en préparation et l'entrée en vigueur de la norme relative au soufre. Le réseau de distribution du carburant diesel dans l'Arctique a-t-il besoin de temps supplémentaire pour se préparer à appliquer l'exigence relative à la norme de 15 ppm?

Une autre question qui se pose dans l'Arctique, c'est qu'en vertu du règlement américain sur le diesel, l'Alaska peut se prévaloir de l'option l'autorisant à présenter à l'EPA une demande en vue d'établir son propre programme de transition au diesel à 15 ppm. Si cet État ne présente pas de demande, le programme de transition applicable dans le reste des États-Unis s'appliquera aussi en Alaska. Cet État doit présenter sa demande avant 2002. S'il présente une demande, il pourrait s'écouler plusieurs mois avant que l'EPA ne prenne une décision à ce sujet (peu après la finalisation prévue du règlement canadien). On s'attend que, même si l'État adopte un programme spécial, une portion considérable de la production de carburant diesel routier de l'Alaska serait conforme à la norme de 15 ppm (mais peut-être moins que la proportion de 80 % établie dans le reste des É.-U.). Une partie de l'approvisionnement en diesel du Canada provient de raffineries de l'Alaska, en particulier au Yukon10. Compte tenu des contraintes législatives imposées par la LCPE, 1999, comment la réglementation canadienne devrait-elle régler la question des importations de carburant diesel routier en provenance de l'Alaska pendant la période de transition prévue aux États-Unis?

Il faut aussi se demander comment les teneurs en soufre doivent être mesurées. Aux termes du règlement américain, il faut utiliser la méthode ASTM D-6428-99 pour mesurer la teneur en soufre du carburant diesel. Le Canada devrait-il adopter cette méthode, ou mettre au point sa propre méthode? Devrait-on autoriser le recours à d'autres méthodes aux fins du suivi des dossiers et de la rédaction des rapports? Si oui, quelles sont les méthodes de rechange qui devraient être permises? Par le passé, Environnement Canada s'est appuyé largement sur les avis de l'Office des normes générales du Canada et de ses propres spécialistes concernant ces questions.

4.2 Enjeux non liés à la réglementation

L'Avis d'intention pour des véhicules, des moteurs et des carburants moins polluants mentionne qu'Environnement Canada « examinera la possibilité de prendre des mesures complémentaires aux règlements, comme des instruments économiques et d'autres mesures, dans le but de promouvoir l'introduction hâtive de carburants moins polluants, comme les carburants à faible teneur en soufre. »

Dans le but de promouvoir l'introduction de carburant diesel à faible teneur en soufre avant la date cible (2005) à laquelle la norme de 50 ppm deviendra obligatoire dans les pays de l'Union européenne, bien des pays européens ont recours avec succès à une taxe différentielle (moins élevée), notamment les suivants : Finlande, Danemark, Grande-Bretagne, Allemagne, Suède et Norvège, en plus de Hong Kong. L'Autriche, les Pays-Bas, la Suisse et l'Australie envisagent sérieusement d'instaurer une taxe différentielle pour le diesel à faible teneur en soufre. Par exemple, en Grande-Bretagne, la taxe différentielle a fait passer à plus de 99 % la part de marché du carburant diesel à faible teneur en soufre, soit cinq ans et demi avant la date butoir fixée par le règlement; au Danemark, immédiatement après l'introduction de cette taxe moins élevée, la part du marché du carburant diesel à 50 ppm est passée à 100 % presque du jour au lendemain, ce qui s'est traduit par une baisse importante de la concentration de particules dans l'air ambiant à Copenhague. Les taxes différentielles varient d'un pays à l'autre, l'écart se situant en moyenne entre 2 et 6 cents canadiens le litre11.

Le Canada a acquis un peu d'expérience dans ce domaine avec les taxes différentielles appliquées aux combustibles propres. En 1989, le gouvernement fédéral a fixé la taxe sur l'essence sans plomb à un cent de moins le litre par rapport à la taxe sur l'essence au plomb (il y avait également une différence de taxe de ce genre en Colombie-Britannique et en Ontario en 1987 et en 1988). De plus, le gouvernement fédéral accorde une exemption de la taxe d'accise fédérale pour la portion éthanol de l'essence mélangée à de l'éthanol.




Notes de bas de page

10 D'après les données de Douanes Canada, 31 249 m3 de carburant diesel à 500 ppm et 17 135 m3 de carburant diesel régulier ont été importés au Yukon en 1998. Ces chiffres représentent environ 40 % des ventes totales de carburant diesel dans l'Arctique.
11 Environnement Canada. Examen des initiatives internationales visant à accélérer la réduction du soufre dans le carburant diesel. Préparé pour la Direction du pétrole, du gaz et de l'énergie par B. Olvastri et M. Williamson, décembre 2000, 50 p.

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5. Questions pour les intervenants

Environnement Canada s'emploie maintenant à élaborer une réglementation visant à limiter à 15 ppm la teneur en soufre maximale dans le carburant diesel routier à partir de juin 2006. On invite les parties intéressées à fournir leurs opinions sur la façon dont la réglementation doit être structurée.

  1. 1. La réglementation canadienne devrait-elle permettre aux entreprises de produire et d'importer une petite quantité de carburant diesel routier ne satisfaisant pas à la norme de 15 ppm de soufre pour une courte période après juin 2006, sachant que pour ce faire, il faudrait une réglementation complexe en vue de régler les problèmes qui se posent en aval? Compte tenu des contraintes législatives liées à la LCPE 1999, quels genres d'assouplissements semblables à ceux que les États-Unis préconisent pour les raffineurs et les importateurs devrait-on envisager, s'il y a lieu? Quels en seraient les coûts et les avantages par rapport à une réglementation dépourvue de ce genre d'assouplissements?

  2. Si l'on permettait l'utilisation de deux qualités de carburant diesel routier pendant un court laps de temps :
    1. Comment pourrait-on assurer l'approvisionnement en carburant diesel à 15 ppm partout au Canada? Quelles seraient les prescriptions requises dans la réglementation?
    2. Quelles sont les précautions que l'on devrait prendre pour réduire au minimum l'utilisation d'essence contre-indiquée et la contamination du carburant diesel à faible teneur en soufre?
    3. Comment peut-on gérer la contamination de lots de carburant diesel à faible teneur en soufre?
    4. Faudrait-il inclure un programme temporaire d'échange des crédits d'émissions de soufre? Comment pourrait-on délimiter les régions d'échange? Devrait-on permettre les crédits pour la production hâtive de carburant à faible teneur en soufre?
  3. Faut-il accorder plus de temps au réseau de distribution du carburant diesel dans l'Arctique pour qu'il puisse se préparer à se conformer à la norme de 15 ppm (en plus des trois mois qui seront vraisemblablement alloués partout ailleurs au Canada)?

  4. En se conformant aux restrictions législatives liées à la LCPE 1999, de quelle façon la réglementation canadienne devrait-elle gérer les importations de carburant diesel routier à partir de l'Alaska durant la période de transition des États-Unis?

  5. Quelle est la méthode appropriée pour mesurer la teneur en soufre dans le carburant diesel routier à des concentrations inférieures à 15 ppm? Devrait-on permettre d'autres méthodes aux fins du suivi des dossiers et de la production de rapports? Quelles méthodes de remplacement devraient être permises? Les techniques fondées sur le rendement devraient-elles être envisagées?

  6. Est-ce que l'on devrait aussi envisager l'utilisation d'autres instruments adoptés par d'autres pays?

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6. Marche à suivre

Les parties sont invitées à présenter leurs points de vue par écrit à Environnement Canada d'ici le 15 juin 2001 concernant les sujets abordés dans le présent document. Les commentaires écrits doivent être postés à :

Règlement sur le carburant diesel à faible teneur en soufre
À l'attention de Bruce McEwen
Direction du pétrole, du gaz et de l'énergie
351, boul. St. Joseph, 10e étage
Hull (Québec)
K1A 0H3

On peut également fournir ses commentaires par courriel à Bruce.McEwen@ec.gc.ca ou par télécopieur au 819-953-8903..

Environnement Canada a l'intention de rédiger cet été le règlement sur le carburant diesel routier. En attendant son approbation par le gouverneur en conseil, on prévoit la publication du règlement dans la Partie I de la Gazette du Canada à l'automne 2001. Le règlement final serait publié dans la Partie II de la Gazette du Canada 8 à 10 mois plus tard, c'est-à-dire à l'été ou à l'automne 2002. L'Institut canadien des produits pétroliers, au nom de toutes les raffineries du Canada, a indiqué qu'il endosse cet échéancier.

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Annexes

Annexe A : Comparaison des avantages pour la santé humaine au Canada et aux États-Unis

En 1997, par ses travaux visant l'établissement de concentrations maximales de soufre dans l'essence et le carburant diesel, le groupe d'experts indépendant sur la santé et l'environnement a estimé l'effet sur la santé découlant de la réduction de la concentration de soufre dans le carburant diesel routier dans sept grandes villes du Canada, qui passerait de 475 ppm à une moyenne de 50 ppm. On peut extrapoler ces valeurs estimatives à tout le Canada en utilisant la méthodologie mise au point par le Groupe de travail gouvernemental sur le soufre dans l'essence et le carburant diesel (GTG)12. La colonne 4 du tableau ci-dessous présente les estimations du GTG ajustées afin de refléter la diminution de la teneur en soufre qui est envisagée actuellement. Il convient de noter que ces chiffres ne tiennent pas compte des nouvelles prescriptions relatives aux véhicules lourds, qui seraient encore plus bénéfiques.

Cette estimation des avantages pour la santé de la population canadienne correspondrait au dixième des avantages pour les États-Unis (c.-à-d. toutes proportions gardées selon la population relative des deux pays), qui ont été estimés par l'EPA pour son nouveau programme de réduction du soufre dans le carburant diesel et pour les véhicules lourds.

Comparaison des avantages pour la santé humaine au Canada et aux États-Unis
Effet sur la santéRéduction du nombre de cas par année
D'après les travaux du GTG de 1998D'après les estimations de l'EPA
Sept grandes villes -2020
(475 à 50 ppm)
Canada 2020
(475 à 50 ppm)
Canada 2020
(niveaux régionaux* à 10 ppm)
1/10 des avantages pour les É.-U. 2030
Décès prématurés193024830
Admissions à l'hôpital223528710
Visites à l'urgence619777240
Nouveaux cas de bronchite chronique6710785550
Troubles des voies respiratoires inférieures – enfants (Canada) /Nouveaux cas de bronchite aiguë chez les enfants (É.-U.)8431 3401 0601 760
Journées de symptômes d'asthme (Canada) /Crises d'asthme (É.-U.)29 57847 00037 20036 000
Journées d'activités restreintes14 02522 30017 600S.O.
Journées de symptômes respiratoires aigus (Canada) /Troubles respiratoires chez les enfants (É.-U.)101 000160 700127 00038 600
Journées de travail perduesS.O.S.O.S.O.150 000

(*) Concentrations régionales en 1999 : Pacifique et Yukon, 330 ppm; Prairies et Nord, 250 ppm; Ontario, 360 ppm; Québec, 410 ppm; Atlantique, 390 ppm. Dans tous les cas, les concentrations régionales de 1999 étaient bien en deçà du niveau de 475 ppm supposé par le groupe d'experts sur la santé. Source : Rapport d'Environnement Canada sur le Soufre dans les carburants liquides, de 1999.

Annexe B : Estimation des coûts pour les raffineries du Canada

Des études visant à estimer les coûts de deux scénarios concernant le carburant diesel routier ont été menées dans le cadre de travaux amorcés en 1997 en vue de déterminer la teneur appropriée en soufre de l'essence et du carburant diesel. Dans le processus d'étude du soufre dans l'essence et le carburant diesel, un groupe d'experts sur les coûts et la compétitivité a été engagé par un consultant (Kilborn Inc.) en vue d'effectuer l'analyse des coûts. D'après les résultats de cette analyse sur les scénarios liés au carburant diesel routier, il est possible d'extrapoler des estimations pour une limite supérieure de 15 ppm.

L'étude sur les coûts intitulée « Étude sur le soufre dans l'essence et le carburant diesel : Coûts de la réduction au Canada de la teneur de l'essence et du carburant diesel en soufre » entreprise par Kilborn Inc. permet de mieux comprendre les modifications techniques ainsi que les coûts en immobilisation et les frais d'exploitation que devraient assumer les raffineries du Canada afin de se conformer aux diverses normes en matière de carburants. Le consultant a obtenu directement de 15 raffineries canadiennes des informations sur les coûts, et pour les autres raffineries, il a appliqué un modèle des coûts d'immobilisation et d'exploitation. Dans les deux cas, les estimations relatives aux coûts sont fondées sur les techniques existantes de réduction du soufre et sur les infrastructures existantes des raffineries. Le consultant a vérifié l'information fournie par les raffineries afin d'en assurer la cohérence sur le plan technique. Les données sur les coûts ont été compilées par région dans le but de protéger la confidentialité des données relatives aux entreprises.

Les coûts estimatifs pour les raffineries qui seraient liés à la réduction du soufre dans le carburant diesel routier jusqu'à une moyenne de 50 ppm avec une limite maximale de 100 ppm sont présentés au tableau ci-dessous. On trouvera les détails du calcul de ces estimations dans le rapport du consultant (c.-à-d. aux tableaux 4.1, 4.2 et 4.6).

RégionImmobilisations13
(en millions de dollars)
Exploitation
(en millions de dollars par année
Recouvrement des coûts d'immobilisation et d'exploitation
(en cents par litre)
Atlantique & Québec43118,31,47
Ontario37425,72,67
Ouest34835,31,16
Canada115379,31,56

Generating cost estimates for the 15 ppm scenario proposed by the Regulations can be undertaken using a number of methodologies. Three methods of estimation are outlined below.

Le calcul des coûts estimatifs pour le scénario à 15 ppm proposé par le règlement peut se faire à l'aide d'un certain nombre de méthodes, dont trois sont présentées ci-dessous.

La première méthode consiste à extrapoler les coûts estimatifs d'un scénario à 15 ppm à partir des coûts présentés par le consultant pour le scénario à 50 ppm si l'on suppose une relation linéaire entre les coûts et le taux de réduction du soufre. S'appuyant sur cette hypothèse, les coûts de conformité liés à l'adoption d'une norme de 15 ppm pour la concentration maximale de soufre dans le carburant diesel seraient d'environ 108 %14 de ceux qui ont été calculés pour le scénario à 50 ppm, ce qui représente plus précisément 1,25 milliard de dollars d'investissement en immobilisation et 86 millions de dollars en frais d'exploitation. Le recouvrement de tous les coûts d'immobilisation et d'exploitation nécessiterait une hausse d'environ 1,7 cent le litre. Il est reconnu que la relation entre la réduction de la teneur en soufre et les coûts pour des scénarios à moins de 50 ppm n'est pas linéaire. C'est pourquoi cette prévision sous-estimerait vraisemblablement les coûts de conformité pour l'industrie du raffinage.

La deuxième méthode consiste à appliquer à l'industrie canadienne l'estimation des coûts établie pour les États-Unis. L'EPA américaine a estimé que les coûts globaux liés à la conformité pour l'industrie du raffinage aux États-Unis avec un scénario à 15 ppm de limite maximale correspondraient à 4,5 cents à 5 cents américains le gallon. On prévoit que chaque raffinerie des États-Unis dépenserait en moyenne quelque 30 millions de dollars ($US) en immobilisations en 2004 et 2005, et encore 8 millions de dollars ($US) par année en frais d'exploitation à compter de 2006 (nota : les raffineries américaines sont généralement plus grandes que celles du Canada). Si ces chiffres sont convertis en dollars canadiens et appliqués aux 17 raffineries du Canada qui produisent du carburant diesel routier15, les coûts totaux d'immobilisation seraient d'environ 765 millions de dollars canadiens et les frais d'exploitation s'élèveraient à 204 millions de dollars canadiens par année. Selon cette méthode, le coût unitaire serait le même qu'aux États-Unis, c'est-à-dire entre 1,8 et 2,0 cents le litre.

Une troisième méthode consiste à établir une estimation grossière des coûts d'après les prévisions de l'American Petroleum Institute (API), qui estime que les coûts liés à l'adoption d'une norme de 15 ppm seraient d'environ le double des coûts liés à l'application d'une norme de 50 ppm. D'après les estimations compilées par Kilborn Inc., cette méthode permet d'estimer les coûts d'immobilisation pour l'industrie du raffinage à environ 2,3 milliards de dollars Canada, et de 159 millions de dollars par année en frais d'exploitation, ce qui correspond à un coût unitaire moyen de 3,1 cents par litre. Kilborn Inc. a indiqué que les coûts ne seraient pas assumés également par les raffineries du Canada.

Il est raisonnable de supposer qu'une compilation de tous les coûts des raffineries fondée sur une technique d'analyse rigoureuse aboutirait à un résultat intermédiaire entre l'application de la méthode de l'API (c.-à-d. 2,3 milliards de dollars) et l'extrapolation des résultats pour un scénario à 15 ppm d'après les estimations de Kilborn pour un scénario à 50 ppm (c.-à-d. 1,25 milliard de dollars). Ainsi, le coût unitaire moyen serait vraisemblablement compris entre 1,6 cent et 3,1 cents le litre, et probablement comparable à l'estimation de l'EPA, soit 2,0 cents le litre. Étant donné le degré d'incertitude dans l'analyse de Kilborn (± 40 % sur les frais d'immobilisation), une autre étude du genre ne fournirait probablement pas une fourchette plus étroite des coûts que celle qui est présentée ci-dessus.

Il convient de noter que l'EPA a constaté que la technologie en voie d'élaboration peut contribuer à diminuer de 25 % les coûts liés à la réduction du soufre dans le carburant diesel routier. L'expérience menée aux États-Unis sur la reformulation des carburants a démontré que les coûts liés à la conformité sont généralement inférieurs, et parfois très inférieurs, à ceux que l'on avait prévus au départ. Le consultant qui a évalué les effets de la réduction du soufre dans l'essence et le carburant diesel sur la compétitivité des raffineries du Canada (Purvin & Gertz) en arrive à la conclusion suivante :

"Tous ces programmes [des États-Unis] – depuis l'essence sans plomb jusqu'à l'essence reformulée – ont donné lieu à une série de réactions comparables de la part de l'industrie du pétrole. En général, on observe aux premiers stades des projets des protestations et des mises en garde concernant les pénuries d'approvisionnement. De façon générale, les programmes ont été grandement modifiés en vue d'atténuer certaines inquiétudes de l'industrie. Des études sont menées qui concluent à des coûts de conformité prohibitifs et à une hausse importante des prix, mais la mise en uvre des programmes se poursuit. Habituellement, à mesure que la date butoir approche, l'industrie du raffinage s'est rendu compte que les coûts liés à la conformité sont beaucoup moins élevés que prévu."16 [Traduction]

Annexe C : Cadre possible pour la réglementation canadienne

Le règlement qui serait élaboré en fonction des deux options discutées à la section 4 serait très différent selon l'option choisie.

Option 1

Si le Canada harmonisait en grande partie sa réglementation avec la norme américaine de qualité du carburant diesel routier, il établirait à 15 ppm la limite unique « à ne jamais dépasser » pour le soufre dans le carburant diesel routier à partir du 1er juin 2006 à la raffinerie et aux points d'importation, et la limite de 15 ppm à compter du 1er septembre 2006 aux points de vente en gros et au détail. À cette fin, on pourrait simplement modifier le Règlement sur le carburant diesel existant. Cette modification toucherait également la méthode d'évaluation du soufre dans le carburant diesel17.

Option 2

Si le Canada s'aligne sur la plupart des assouplissements contenus dans le règlement américain sur le carburant diesel routier, il devra élaborer un nouveau règlement pour remplacer le Règlement sur le carburant diesel existant. (La structure du règlement actuel ne pourrait pas être adaptée de façon à inclure les dispositions nécessaires en vue de gérer les nombreuses questions liées à l'existence de deux qualités de carburant diesel routier.)

Selon cette option, Environnement Canada envisage un règlement qui établirait à 15 ppm la teneur limite en soufre pour 2006, mais il offrirait aux parties visées par le règlement la possibilité de participer à un programme de transition. Si une partie visée décidait de ne pas prendre part au programme de transition, elle serait assujettie à la limite de 15 ppm à compter de juin 2006 mais serait dispensée de certaines exigences administratives imposées à ceux qui participent à ce programme.

Les parties visées qui opteraient pour le programme de transition pourraient produire une petite portion de leur lot de carburant diesel routier satisfaisant à la limite existante de 500 ppm. Ce règlement pourrait également inclure un programme de production, de banque et d'échange de crédits. Le cas échéant, le règlement devrait définir toutes les règles s'appliquant au programme, y compris les restrictions au chapitre des échanges ainsi que le suivi et les rapports concernant les échanges.

Mais ces assouplissements devraient s'accompagner de beaucoup d'autres exigences administratives. Il faudrait tenir des dossiers et mener des évaluations afin de s'assurer que la partie visée par le règlement a produit ou importé le volume requis de carburant diesel à 15 ppm. On devrait aussi indiquer dans les dossiers les divers types de carburant diesel avant leur distribution, qu'ils proviennent des raffineries du Canada ou de l'importation. Les rapports à Environnement Canada seraient beaucoup plus complets que sous l'option 1. De plus, une vérification annuelle indépendante serait probablement exigée si le règlement découlait de l'option 2.

À cause de l'existence d'une deuxième qualité de carburant diesel routier, il faudrait établir des dispositions extrêmement complexes et lourdes à administrer afin d'assurer l'application du règlement. Ces dispositions incluraient la documentation du transfert des produits et des clauses visant à assurer la séparation des deux qualités, et la gestion de la contamination occasionnelle du carburant diesel à faible teneur en soufre. Aux installations de ravitaillement, le type de carburant diesel devrait être indiqué d'une façon ou d'une autre. Il y aurait probablement aussi une interdiction d'utiliser le carburant diesel à teneur élevée en soufre dans les nouveaux véhicules lourds. D'autres dispositions devront sans doute être ajoutées une fois que l'élaboration du règlement sera plus avancée.




Notes de bas de page

12 Rapport d'évaluation des effets sur la santé et l'environnement, 25 juin 1997 (révisé en mars 1998), tableau B-34; Groupe de travail gouvernemental, 1998. « Établissement d'une limite pour la teneur en soufre de l'essence et du carburant diesel ». 14 juillet 1998, tableau A.4.6.
13 Fourchette d'incertitude : + 40 % pour les coûts d'immobilisation et + 25 % pour les coûts d'exploitation.
14 Calculé d'après les teneurs moyennes de (475 - 10) / (475 - 45 ppm) = 1,08 %.
15 Les usines de lubrifiants de Suncor et de Petro-Canada produisent aussi une petite quantité de carburant diesel, mais ce n'est pas leur principal produit.
16 Analyse de Purvin & Gertz de l'expérience des États-Unis sur le carburant reformulé, rapport de la Phase II, mai 1997, p. VI-1.
17 Pour avoir une idée plus précise des parties visées par la réglementation, Environnement Canada peut aussi saisir l'occasion pour ajouter une disposition exigeant des raffineurs et des importateurs de carburant diesel qu'ils s'inscrivent auprès du Ministère. Cette exigence serait analogue à celle contenue à l'article 7 du Règlement sur le benzène dans l'essence exigeant l'inscription des raffineurs et des importateurs d'essence.

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