Les dix événements météorologiques les plus marquants de 2003

Table des matières

  1. Année de climat désastreux pour la C.-B. – incendies, inondations et gelées
  2. L'ouragan Juan et « les aspirants ouragans Juan »
  3. Un hiver long et froid saisit l'Est du Canada
  4. Le Canada en feu de l'Ontario à l'Okanagan
  5. Une sécheresse interminable dans les Prairies
  6. Les pluies abondantes les plus coûteuses du Canada atlantique
  7. La tempête de verglas du siècle pour le Nouveau-Brunswick
  8. Une année record d'avalanches mortelles
  9. Tempêtes de neige printanières en Alberta
  10. Ère glaciaire à Badger

1. Année de climat désastreux pour la C.-B. - incendies, inondations et gelées

La Colombie-Britannique n'a jamais été punie par des événements météorologiques extrêmes aussi variés que ceux de l'an 2003. Les incendies de l'été ont beaucoup retenu l'attention et pour cause. C'était la saison d'incendie la plus terrifiante de mémoire d'homme et le désastre naturel le plus coûteux de l'histoire de la C.-B. Sans compter les pertes de bois, le coût eul de la lutte contre les feux de forêt s'est élevé à 500 millions de dollars. En tout, près de 2 500 feux de forêt ont calciné 2650 kilomètres carrés de terre, de brousse et de zones résidentielles – soit 11 fois l'étendue moyenne annuelle brûlée au cours des 10 dernières années. C'était le deuxième état d'urgence dans toute la province de C.-B., et le plus long. Trois pilotes d'avions ont perdu la vie en combattant les flammes et 334 résidences ont été brûlées. Le Bureau d'assurance du Canada a déclaré ce seul événement comme étant la plus importante perte d'assurance pour un incendie de forêt au Canada avec des pertes de biens assurés s'élevant à au moins 250 millions de dollars. La portée des conséquences émotionnelles ne pourra jamais être mesurée.

Les conditions propices aux incendies de l'été en C.-B. se sont développées au cours des quatre dernières années. Dès le début de 2003, certaines régions le long de la côte du Pacifique et à l'intérieur de la zone du sud traversaient déjà la pire sécheresse des cent dernières années. De 2000 à 2002 inclusivement, seules deux des douze saisons ont été plus pluvieuses que la normale dans le sud de la Colombie-Britannique et une saison seulement a été plus froide que la normale. Avant cet été, le sud de la C.-B. avait subi une période record de trois années de sécheresse.

Les signes de sécheresse prolongée étaient évidents partout. La baisse presque record des débits de rivières (10 à 20 % de la normale dans certaines régions) et la déficience des eaux souterraines avaient suscité des inquiétudes de la part des compagnies d'électricité, des services publics d'aqueducs et des propriétaires de résidences alimentées par un puits. Vers le 1 er juillet, la rivière Fraser a atteint le niveau le plus bas depuis que le suivi des niveaux d'eaux a commencé il y a 90 ans. Les ours affamés rôdaient dans les banlieues; des nuées de coccinelles grignotaient les pins; le saumon suffoquait dans les rivières aux températures trop élevées pour supporter l'espèce; inquiètes, les compagnies de services publics  importaient de l'énergie; et les éleveurs désespérés par le manque d'eau abattaient leurs bêtes pour réduire la taille de leurs troupeaux.

Les choses pouvaient-elles empirer? Oui! Pendant une bonne partie de l'été, une vaste zone de haute pression atmosphérique du Pacifique, ancrée près de la côte, a abrité la Colombie-Britannique des soubresauts habituels du climat. À certaines stations météorologiques à l'intérieur de la province les températures ont atteint 40 °C. À Kamloops, les températures ont dépassé 30 °C pendant 19 jours au mois de juillet et durant 20 jours au mois d'août : la température moyenne normale de chacun de ces mois est de 11 degrés. La ville de Kelowna a enregistré la période de juin, juillet, août la plus aride depuis que l'on a commencé à rassembler des statistiques en 1899 et a établi un nouveau record de 44 jours consécutifs sans pluie. Sur la côte, en ne recevant qu'une quantité dérisoire de 8,2 mm de pluie, Victoria a connu l'été le plus sec de ses annales qui remontent à 1914. Les forêts au sud connaissaient une sécheresse extrême et le tapis forestier était très volatil ; il suffisait d'une étincelle pour les embraser. Des éclairs d'orages « secs » (peu ou pas de précipitation), des vents violents et un peu de négligence humaine ont fait le reste.

La Colombie-Britannique affronte normalement un seul feu majeur par an qui empiète sur les communautés. Cette année, les pompiers ont dû faire face à au moins huit feux de ce type. La crise a débuté au début du mois d'août lorsque les feux ont incinéré la petite municipalité de Louis Creek et menacé la ville de Barriere et les banlieues de Kamloops. Des douzaines de résidences et d'entreprises, y compris deux scieries, ont brûlé au complet. Ce n'était que le début de l'incendie qui allait ravager la province. Deux semaines plus tard, la foudre a mis le feu à la forêt desséchée du Okanagan Mountain Park au sud de Kelowna. Des vents violents ont poussé les flammes à grande vitesse vers la ville et ont pris de cours les pompiers, qui ont dû reculer. Le 23 août, les flammes avaient rasé 250 résidences et avaient forcé l'évacuation d'un tiers de la population de Kelowna.

Au total, plus de 50 000 résidents de la C.-B. ont été évacués du danger des flammes et de la fumée en 2003 – la deuxième plus grande évacuation de l'histoire canadienne. En pleine saison d'incendie, 7600 pompiers civils et environ 2000 militaires luttaient contre les flammes.

À peine un mois plus tard, les incendies d'été ont fait place aux pluies et aux inondations automnales. Une énorme tempête, surnommée la « Pineapple Express » par les météorologues, a transporté des quantités incroyables d'humidité en provenance du Pacifique tropical près de Hawaï. Le système a généré des quantités de pluie record et détrempé la côte de la C.-B., ayant pour résultat des inondations majeures et des glissements   de terrain. Les pentes dénudées par les incendies de forêts antérieurs ne pouvaient plus contenir les eaux déchaînées à mesure que celles-ci emportaient avec elles la terre et les arbres des montagnes. Le niveau de la rivière Lillooet près de Pemberton a atteint un sommet record, s'élevant de 4,8 m en deux jours seulement. Les pluies diluviennes ont détruit de précieuses frayères de pêche et contaminé les systèmes d'eau potable; les routes étaient inondées par 2 à 3 m de pluie et les fermiers cherchaient désespérément à déplacer leur bétail vers des terrains plus élevés. Le déluge représente un désastre pour une industrie forestière déjà paralysée, et a mis en chômage temporaire les bûcherons en raison de routes fermées et de terres inondées. Les réservoirs qui n'étaient que des vasières un mois auparavant se sont remplis et menaçaient de se déverser. Les pluies qui se sont poursuivies tout au long de la semaine ont fait quatre morts, forcé 1200 personnes à fuir leurs résidences envahies par la boue et emporté dans les flots des ponts et des routes. Les dommages se sont élevés à des dizaines de millions de dollars. Les pluies continuelles et intenses représentent probablement le plus grand déluge qui ait frappé la côte ouest depuis plus de 200 ans. Les pluies, similaires à des conditions de mousson, ont atteint 40 mm à l'heure dans certaines régions, battant ainsi tous les records. Le 16 octobre a été le jour le plus pluvieux des annales de Victoria avec 136 mm de pluie; Squamish a connu plusieurs journées de pluie record avec, entre autres, 239 mm en deux jours, 318 mm en trois jours et 369 mm en quatre jours; dans la « Elaho Valley », ce sont près de 600 mm de pluie qui sont tombés en quatre jours.

Les inondations ont cédé la place aux gelées au début de novembre alors qu'un courant persistant du Nord s'est engouffré dans la majeure partie de la Colombie-Britannique, battant des dizaines de records de basses températures pour le mois. À l'intérieur des terres, c'était un début de novembre parmi les plus froids depuis des années (le mois d'octobre avait été le deuxième mois le plus chaud enregistré à Kamloops). À Kelowna, il faisait -13 °C le 5 novembre soit une température d'environ 5°C de moins qu'en janvier, le mois le plus froid de l'année. À Victoria, des températures glaciales record ont détruit les fleurs et inquiété les cultivateurs de fruits. Vancouver a établi des records de basses températures quotidiennes pendant trois jours de suite, tombant à -4,6 °C, soit une température inférieure à celle de tout l'hiver dernier.

Mais Dame nature n'avait pas fini son oeuvre. Le 28 novembre, à Vancouver, des pluies abondantes et des vents forts ont inondé les résidences et les routes. C'était une des pluies les plus abondantes à avoir frappé les basses terres continentales. Le système atmosphérique s'est déplacé très lentement et a eu le temps de laisser tomber plus de 100 mm de pluie en 24 heures. La tempête a déclenché un glissement de terrain qui a rompu un gazoduc alimentant Prince Rupert, laissant certains résidents sans combustible pendant une semaine.

La liste de désastres météorologiques ne couvre pas les pertes dévastatrices de bois infligées par les scolytes qui continuent de vivre de manière prospère et de se propager dans des conditions atmosphériques idéales – soit des étés chauds et secs et des hivers doux.

2. L'ouragan Juan …. et ses aspirants

Les experts en ouragans avaient prédit une saison de tempêtes plus active et plus intense dans l'Atlantique Nord et ils avaient bien raison. En 2003, 16 ouragans « nommés » se sont formés dans l'Atlantique, un nombre bien au-dessus de la moyenne à long terme de 10 ouragans. Ce fut également la saison la plus longue de ces 50 dernières années.Deux ouragans, Odette et Pierre, ont fait leur apparition en décembre. La dernière fois que deux tempêtes tropicales se sont développées dans l'océan Atlantique en décembre, c'était en 1887! Sept des 16 tempêtes se sont transformées en ouragans, atteignant une activité maximale en septembre alors que quatre ouragans « surnommés », dont trois mortels, ont pénétré en territoire canadien. Une température de l'eau plus élevée que la normale dans l'océan Atlantique a été déterminante pour faire de l'année 2003 une autre année d'intense activité ainsi qu'à poursuivre la tendance qui a rendu la dernière décennie la période la plus intense des annales au titre des tempêtes tropicales de l'Atlantique.

L'ouragan Fabien fut le premier à arriver, le 7 septembre, de la pointe sud-est des Grands Bancs de Terre-Neuve et Labrador, coulant un yacht et noyant trois hommes. Le 19 septembre, Isabel s'était beaucoup affaibli en entrant au Canada par l'Ontario, alors que c'était un ouragan de catégorie 2 à son arrivée sur les rives du cap Hatteras en Caroline du Nord. (Voir les tableaux relatifs aux intensités des ouragans, en dernière page). En Ontario, Isabel a deversé des quantités de pluie de l'ordre de 30 à 50 mm   alors que les rafales de vent ont atteint 73 km/h. Dans la partie ouest du Lac Ontario, les vagues ont atteint une hauteur de quatre mètres. Les vents ont déraciné des arbres, arraché des branches et privé temporairement d'électricité 40 000 résidants. Les prévisions de l'ouragan Isabel, quoique correctes, n'ont pas atteint le caractère sensationnel annoncé à la population. Les dommages en Ontario ont été minimes en raison du passage très rapide de la tempête à travers la province. L'ouragan Kate, qui est arrivé en octobre en passant au sud de cap Race (Terre-Neuve et Labrador ), a déferlé avec des vents soutenus d'une vitesse maximale de 120 km/h et a généré des vagues d'une hauteur de 10 mètres. En octobre, une seule journée pluvieuse a établi un record lorsque la ville de St. John a été saturée de 45,2 mm de pluie.

L'ouragan Juan, qui est survenu entre Isabel et Kate, a frappé Halifax de plein fouet et changé à tout jamais l'aspect de la ville. Juan a été l'ouragan le plus désastreux de l'histoire moderne d'Halifax. Les pertes totales subies par la Nouvelle-Écosse et l'Île-du-Prince-Édouard se sont élevées à plus de 100 millions de dollars, sans compter des pertes supplémentaires assurables de plus de 82 millions de dollars alors que certaines ne sont pas encore comptabilisées. L'événement le plus tragique a été la perte irremplaçable de 100 millions d'arbres, dont plusieurs arbres centenaires. À Point Pleasant Park, parc populaire d'Halifax, l'ouragan a détruit 70 % des 86 000 arbres. Huit personnes ont péri à la suite de cet ouragan et de ses effets ultérieurs.

L'historique de sa trajectoire démontre que l'ouragan Juan s'est déplacé de son lieu d'origine au sud-est des Bermudes et a déferlé sur Halifax le 29 septembre, quelques minutes après minuit. La dernière fois que la ville portuaire avait été frappée par le "mur de l'œil" d'un ouragan (là où se situent les vents les plus violents de ce type de tempête) était en 1893, lorsqu'un ouragan de catégorie 2 à 3 (des vents soutenus de 176 à 185 km/h) s'était abattu sur la ville. En septembre 1798, un ouragan avait touché terre près du port de Halifax, déraciné des arbres énormes et emporté des goélettes. L'ouragan Juan, qui s'est déplacé à toute allure vers le Nord à travers la Nouvelle-Écosse, s'est affaibli rapidement – comme les tempêtes tropicales le font sur terre – et n'était plus qu'un ouragan de faible intensité lorsqu'il est arrivé à l'Île-du-Prince-Édouard. Juan n'était que le quatrième ouragan de catégorie 2 à frapper la Nouvelle-Écosse depuis les années 1800 et seulement le deuxième ouragan à frapper l'Île-du-Prince-Édouard depuis l930. La progression rapide de Juan signifiait qu'il a passé moins de temps au-dessus des eaux plus froides de la plate-forme Scotian, laissant ainsi à la tempête moins de temps pour s'affaiblir.

Le tout s'est soldé par une immense chaos: l'ouragan Juan a arraché des câbles électriques, inondé des propriétés riveraines, coulé des douzaines de yachts, soulevé des trottoirs et endommagé les habitations majestueuses du centre-ville de Halifax et de Charlottetown. Tout au long de la côte atlantique, des marinas et des ports entiers ont dû être reconstruits. Lors de son activité maximale, Juan a laissé plus de 300 000 résidences sans électricité en Nouvelle-Écosse et dans l'Île-du-Prince-Édouard. Juan était un ouragan de catégorie 2 lorsqu'il a frappé la Nouvelle-Écosse avec des vents soutenus de 158 km/h et des rafales de plus de 185 km/h. Les vents ont généré des marées de tempête de plus de 1,5 m et élevé le niveau de l'eau dans le port de Halifax à un niveau record de 2,9 mètres. À l'extérieur du port, des vagues atteignant 20 mètres de hauteur ont été enregistrées. Heureusement, les quantités de pluie de l'ouragan Juan n'ont pas été fortes, soit de l'ordre de 25 à 40 mm.

Ironiquement, l'ouragan Juan a forcé l'évacuation du Centre canadien des ouragans à Dartmouth. La puissance du vent a fait osciller l'édifice de dix-neuf étages à un point tel que les personnes s'y trouvant en ont eu la nausée. Cependant, à l'Île-du-Prince-Édouard, même la puissance d'un quasi-ouragan n'est pas parvenu à dissuader les résidents pleins de zèle civique de voter aux élections provinciales. Bien que la moitié des résidences de l'île était sans électricité et que plusieurs rues étaient bloquées par des branches d'arbres tombées, 83 % des électeurs éligibles se sont tout de même présentés pour déposer leur bulletin de vote!

3. Un hiver long et froid saisit l'Est du Canada

Alors que les vents doux d'El Niño musardaient en Colombie-Britannique et en Alberta et, occasionnellement, très à l'est, jusqu'au Manitoba, la majeure partie de l'Est du Canada est restée figée dans un froid polaire durant l'hiver, le plus long et le plus rigoureux des vingt dernières années. Les températures glaciales ont entraîné des niveaux record de consommation d'électricité, les consommateurs montant leur thermostat pour se réchauffer. On espérait vivement un hiver doux dans l'est du Canada car cinq des sept derniers hivers avaient connu des températures au-dessus de la normale. En fait, le froid polaire de l'an 2003 a semblé particulièrement brutal étant donné que des températures des plus douces avaient été enregistrées dans la majeure partie de la région durant l'hiver précédent. Juste au cas où l'Est du Canada aurait oublié les rigueurs de l'hiver, Dame nature a infligé à Montréal 24 jours de froid glacial (l'hiver précédent, la température n'était jamais descendue au-dessous de -20 °C à Montréal), accompagné le plus souvent de vents forts causant des refroidissements éoliens élevés. À Toronto, la température la plus basse de l'hiver précédent était de -14 °C, alors que cet hiver, le mercure   est descendu 32 jours sous cette température-là. La ville a connu neuf alertes de froid extrême dont plusieurs journées consécutives de froid intense. Les villes d'Ottawa et de Montréal ont effectivement connu un dégel de janvier, mais il n'a duré qu'une seule journée. Le Jour de l'An, la température maximale à Ottawa est montée à + 0,1 °C, mais des températures glaciales ont persisté pendant 76 jours d'affilée.

Les « jours de neige » des écoles sont devenus courants dans l'Est du Canada, en raison de la neige abondante, des refroidissements éoliens ou des tuyauteries gelées. En dépit de montagnes de neige et d'un nombre record de jours enneigés dans les régions des Grands Lacs et du Saint-Laurent, une sécheresse hivernale a sévi car les précipitations totales d'hiver ont été les plus basses enregistrées dans la région au cours des 56 dernières années. Les précipitations se sont situées à 40 % au-dessous de la normale sans chute de pluie réellement importante. Il y a eu des chutes de neige importantes et fréquentes. À Toronto, sur 70 des 90 jours entre le 1 er décembre et la fin de février, on a enregistré une légère chute de neige, un rappel quotidien d'un hiver long et persistant.

La température froide et la neige ont été très profitables pour les producteurs d'énergie et les détaillants de vêtements d'hiver et, couplées à l'absence de pluie, ont créé des conditions atmosphériques idéales pour les sports d'hiver. Les conditions hivernales persistantes ont toutefois créé un véritable défi en matière de déblayement des routes et a donné lieu à un déluge de plaintes. Un nombre record de tuyaux ont gelé – deux fois plus que la moyenne des dix dernières années – et le froid inopportun a retardé les coulées de sève d'érable et endommagé 30 à 40 % des vignes de la région de Niagara. En 2003, les paiements d'assurances récoltes aux viticulteurs de l'Ontario ont dépassé les montants totaux versés à ce secteur au cours des 20 dernières années.

L'intensité et la durée du froid en Amérique du Nord ont causé les pires conditions de glace des dix dernières années dans les Grands Lacs et le Saint-Laurent et le long de la côte Est. Des vents violents ont poussé des blocs de glace massifs pouvant atteindre jusqu'à 6 m de haut le long des rives est et sud des Grands Lacs. Les Lacs se sont également recouverts de la plus vaste étendue de glace des annales pour le mois de mars et ce, sur 98 % de la surface des lacs Supérieur, Érié et Huron. Dans le Golfe du Saint-Laurent, l'étendue de la glace était de 50 % plus importante que la normale en mars (la plus importante depuis le début de la tenue d'annales en 1968), ce qui a entravé le service des traversiers, le trafic des marchandises et les opérations de pêche.

4.    Le Canada est en feu de l'Ontario à l'Okanagan

Selon le Centre international canadien d'incendies de forêt, le nombre d'incendies allumés en 2003 a été presque moyen au Canada (8 226 à la fin novembre) mais, n'a consumé que la moitié seulement des hectares (1,6 million d'hectares) si l'on compare avec la moyenne des dix dernières années. Bien que ces statistiques laissent entendrent une année calme en matière d'incendies, la saison 2003 restera gravée dans les mémoires et le coût des effectifs de pompiers s'est élevé à près de 1 milliard $.

Les feux de forêts les plus étendus et les plus dévastateurs ont ravagé la Colombie-Britannique, province dans laquelle le coût seul des effectifs de pompiers s'est élevé à la somme record de 500 millions $. Le Premier ministre de la province a qualifié cette période de la pire saison d'incendies des 50 dernières années. Les assureurs ont nommé cette saison la plus coûteuse de l'histoire canadienne en termes d'incendies de forêt. L'année a été tragique en raison du nombre d'hectares brûlés dans les parcs nationaux des Rocheuses – soit six fois la moyenne annuelle en plus de 10 ans et de loin la pire année de la décennie. De plus, les incendies ont détruit les habitats précieux d'innombrables oiseaux et animaux sauvages.

La Colombie-Britannique n'était pas la seule province embrasée en 2003. Bien que les incendies en Alberta n'aient consumé qu'un huitième de la surface brûlée par les feux en 2002, l'année n'a pas été calme. À la mi-juin, des équipes ont lutté contre un incendie majeur près de Fort McKay, où les flammes et la fumée épaisse ont forcé presque 400 résidents et travailleurs à fuir vers Fort McMurray. Néanmoins, c'est à Crowsnest Pass qu'un monstrueux feu de forêt a fait rage. Du bois sec inflammable, des températures brûlantes, une humidité basse, un soleil brûlant et de forts vents de montagne à direction changeante ont attisé les flammes de l'incendie, surnommé l'incendie de Lost Creek, les rendant incontrôlables pendant la majeure partie de l'été. Le confinement des feux était parfois futile sur des terrains escarpés intensément boisés. Des flammes infernales dépassant les 1000 °C ont très vite fait fondre remorques et métal. Les incendies ont chassé plus de 2000 personnes de leurs foyers à une, deux et trois reprises. La fumée et les cendres infernales se déposaient sur les voitures et les trottoirs, polluant l'air de Calgary et de Red Deer. La fumée dense et acre emplissant les vallées a posé de sérieux problèmes de respiration pour les résidents et les équipes de pompiers. Les citoyens priaient pour de la pluie et un apaisement des vents, alors que près de 1000 pompiers travaillaient fiévreusement, 16 heures par jour, dans des circonstances quasi impossibles. Finalement, à la fin du mois d'août, après 30 jours de feu incontrôlé, l'incendie de Lost Creek a été maîtrisé, mais non pas sans l'aide d'une chute de neige tardive de fin d'été et de basses températures. Cependant, des points chauds se sont rallumés brusquement deux mois plus tard.

Au Manitoba, un printemps sec et une pousse tardive combinés à des températures élevées persistantes, des vents furieux et des orages « secs » excessifs ont provoqué des conditions d'incendies de forêt optimales. Les feux ont noirci d'énormes parcelles de forêts du Manitoba, faisant de cette saison la troisième pire saison d'incendies de forêt des annales de la province, en termes de surface brûlée. À certains moments, presque toute la province connaissait des conditions explosives, les incendies de forêt se propageant à la vitesse d'un coureur à pied. Dans le nord-ouest de l'Ontario, la même sécheresse, la faible humidité, les vents incontrôlables et les températures élevées ont provoqué, selon un pompier chevronné, ce qui pouvait être « les pires conditions d'incendie des 25 dernières années. » Lors de la deuxième semaine de juin, des orages « secs » (peu ou pas de précipitation) ont déclenché plusieurs feux. Un incendie important près du Lac Supérieur a forcé l'évacuation de presque 1000 résidents pour échapper aux vagues de fumée et aux flammes envahissantes.

5. Sécheresse interminable dans les Prairies

À la suite de pluies excessives durant la récolte de 2002, des chutes de neige d'hiver normales et au-dessus de la normale et de précipitations printanières, le sol des Prairies au début de la saison de culture se trouvait dans son meilleur état depuis 15 ans. L'année de récolte a commencé avec l'espoir que la sécheresse pluriannuelle, probablement la vague la plus sèche depuis 135 ans, était finalement terminée. Cependant, l'optimisme a été tempéré par les récentes tendances qui indiquaient une majorité de saisons plus sèches et plus chaudes. Les cultivateurs savaient également qu'une humidité minimale du sous-sol signifiait que leur succès éventuel allait dépendre des pluies abondantes d'été. De plus, la température favorisait une épidémie de sauterelles semblable au pullulement de l'an passé qui avait ravagé des millions de dollars de récoltes.

Avec l'arrivée de l'été, la pluie s'est faite rare et de plus, une chaleur écrasante et des vents violents et desséchants ont effacé tous gains d'humidité antérieurs. Une autre année de sécheresse angoissait davantage les agriculteurs et les éleveurs qui étaient déjà défavorablement visés par les luttes commerciales sur les produits agricoles et par la crise de la vache folle. Et, selon les prévisions, la température chaude et sèche avait ramené des multitudes de sauterelles. Les Prairies du sud avaient reçu moins de 38 % de précipitations normales en été – le troisième été le plus sec enregistré depuis 56 ans. Incroyablement, les niveaux de pluies d'été étaient inférieurs aux trois années antérieures de « sécheresse » et les plus bas depuis 1967. Les espoirs de récoltes abondantes se sont rapidement dissipés.

Des conditions atmosphériques chaudes, sèches, ensoleillées et sans gel ont aidé considérablement au moment de la récolte. Plus de 80 % des cultures ont été récoltées dès la première semaine de septembre – une amélioration considérable par rapport à 2002 alors que seulement deux tiers des cultures avaient été récoltés avant le Jour de l'Action de Grâce. De plus, une température idéale a permis à plus de 90 % de la récolte de blé printanier d'atteindre les deux premières catégories, la classant ainsi parmi les récoltes de meilleure qualité de l'histoire récente. La production totale de blé pour l'Ouest du Canada en 2003 s'est élevée à 21 millions de tonnes, légèrement moins que la moyenne des cinq dernières années, mais une augmentation considérable de 45 % par rapport à 2002.

6. La pluie abondante la plus coûteuse du Canada atlantique

À la fin de mars de cette année, une tempête printanière intense s'est déplacée à travers le Canada atlantique et le Golfe du Saint-Laurent. Des pluies abondantes d'un total de 80 à 120 mm sont tombées sur la Nouvelle-Écosse continentale, le sud du Nouveau-Brunswick et l'Ouest de Terre-Neuve – la plupart de cette pluie est tombée en moins de 12 heures. Des pluies d'une abondance digne d'un lave-auto combinées à de fortes neiges sur un sol saturé (déjà en fonte de neige printanière) et des marées hautes ont provoqué des inondations majeures dans les quatre provinces maritimes. Certaines communautés ont reçu l'équivalent d'un mois de pluie en une seule journée, forçant ainsi des évacuations et suscitant de nombreux états d'urgence.

En Nouvelle-Écosse, deux personnes se sont noyées dans la tempête. Des rivières qui n'avaient pas débordé depuis 50 ans étaient prêtes à éclater. Les eaux des inondations ont emporté de nombreux ponts, balayé des centaines de routes et écrasé des murs de sous-sols. L'eau des rivières obstruées a débordé sur les surfaces routières à des profondeurs allant jusqu'à 1,8 m dans certaines régions. Il a fallu jusqu'à cinq mois pour réparer les dégâts de la tempête. Pour la Nouvelle-Écosse, ces pluies d'orage ont été probablement les plus coûteuses de l'histoire de la province avec des pertes totales d'infrastructure publique de 15,6 millions $. Selon le Bureau d'assurance du Canada, cet événement a occasionné un montant supplémentaire de 14,3 millions $ en dommages assurés pour les voitures, les résidences et autres propriétés – les pertes les plus élevées provenant de phénomènes météorologiques dans l'histoire du Canada atlantique.

7. La tempête de verglas du siècle pour le Nouveau-Brunswick

Le sud du Nouveau-Brunswick est célèbre pour ses tempêtes du Jour de la marmotte. Le 2 février 1976, une bourrasque légendaire avait infligé à Saint John une des tempêtes les plus sévères à jamais frapper la Baie de Fundy. En plein milieu du cyclone à déplacement lent, des vents ont été enregistrés à 188 km/h et des vagues ont atteint 12 m. Le Jour de la marmotte de 2003, une tempête de verglas dévastatrice a commencé à couvrir la partie sud de la province d'une couche de 40 à 60 mm de pluie verglaçante. À Wolfe Island, 58,3 mm de pluie verglaçante sont tombés. Moncton a subi le coup le plus dur alors qu'on avait estimé qu'une telle tempête ne frapperait que tous les 75 ans. Après la tempête principale, du vent (à plus de 75 km/h) et un froid brutal ont généré des refroidissements éoliens de –27 °C et ont laissé des milliers de personnes grelotter sous un manteau de glace et de neige. Les gens ont pelleté et creusé pendant plusieurs jours. Les écoles ont fermé pendant une semaine. Les toits de plusieurs granges et de structures d'entreposage se sont effondrés sous le poids de la glace. La tempête a également tué un nombre considérable de bêtes et a détruit des érablières.

Pendant 5 jours, les équipes des services publics et d'électricité ont travaillé sans répit pour réparer les dommages. Pour certains sites, deux ou trois visites ont été nécessaires. Les branches d'arbre, les câbles électriques et les poteaux d'alimentation incrustés de glace se cassaient sous un fardeau de glace pouvant atteindre jusqu'à 33 mm d'épaisseur, aidés par des vents violents. C'était une tempête de verglas historique pour le Nouveau-Brunswick. Les autorités de la centrale électrique provinciale ont déclaré que c'était la pire des saisons de verglas, dépassant de loin l'ampleur et le coût infligés à la province par la tempête de verglas de l'Est du Canada tristement célèbre en 1998. Les coûts de réparation des câbles, des poteaux et des transformateurs se sont élevés à 4 millions $. Plus de 63 000 clients ont été privés de services téléphoniques et d'électricité et des milliers ont passé presque une semaine sans électricité.

8. Une année record d'avalanches mortelles

Dans les Rocheuses canadiennes, les avalanches ont tué vingt-huit personnes cette année. Ce bilan est identique à celui de l'année 1965 et représente la deuxième année la plus mortelle en près d'un siècle. Si le nombre moyen annuel de décès est de 10 environ, l'année 2002-2003 a été une année de type El Nino dont les conditions atmosphériques ont provoqué des manteaux neigeux inhabituels propices aux avalanches. Les conditions d'enneigement changeaient rapidement et souvent, entraînant un risque extrême d'avalanche pendant la plus grande partie de l'année. En début de saison, le problème consistait en un manque de neige et plus tard il y en a eu trop. La combinaison de plusieurs cycles rapides de gel et de dégel et de vents forts a provoqué des manteaux de neige instables tout en laissant des monceaux de neige recristallisée se tasser par-dessus des couches faibles, ayant pour résultat d'énormes saillies de neige et des glissements fréquents.

Deux des pires accidents se sont produits près de Rogers Pass en Colombie-Britannique, lieu de l'avalanche de 1910 la plus mortelle de l'histoire canadienne durant laquelle la neige avait enseveli 62 passagers d'un train et des sauveteurs. Le 20 janvier 2003, une série de trois avalanches dans l'arrière-pays près de Revelstoke ont tué sept skieurs sous le poids de quatre mètres de neige tassée et croûtée. Deux semaines plus tard, sept adolescents de l'Alberta en voyage de ski avec leur école ont péri tout près de Rogers Pass, lorsqu'une grosse plaque de neige s'est effondrée sous son propre poids près du sommet.

Le 11 mars, environ 15 à 25 cm de neige sont tombés dans les parcs nationaux de Mount Revelstoke et Glacier. Une neige pesante, en plus d'un réchauffement soudain, ont déclenché plusieurs avalanches qui ont bloqué la route transcanadienne pendant quelques jours sous un chaos de 2 mètres de neige, de bois et d'autres débris. Les masses de neige en mouvement   étaient d'une telle force qu'elles ont traversé le fond de la vallée et   grimpé de l'autre côté. Des milliers de routiers et autres voyageurs ont dû attendre quatre jours la réouverture de l'autoroute.

9. Tempêtes de neige printanières en Alberta

Si la tempête de neige printanière a été maudite par les personnes vivant en ville, les ruraux étaient ravis. Les 26 et 27 avril, une tempête printanière s'est arrêtée sur le sud de l'Alberta et recouvert de fortes neiges la majeure partie du sud-ouest et du centre de l'Alberta. Des chutes de 50 cm ou plus étaient communes et en plus, des rafales de vents à 60 km/h, ce qui créait d'énormes voiles blancs à l'échelle du sud de l'Alberta, les contreforts avoisinants et les parcs des Rocheuses. La neige est tombée après une journée de 25 à 50 mm de pluie. Les Albertains connaissent généralement les plus grosses chutes de neige en avril et mai (et occasionnellement en juin). Avec une grande quantité d'air froid au printemps, les tempêtes humides et lentes du Pacifique heurtent l'air froid de l'Arctique, ensevelissant parfois des communautés sous une épaisse couche de neige bien longtemps après que la plupart des résidents ont cru que l'hiver était fini.

À Calgary, il est tombé entre 50 et 80 cm de neige environ en moins de 12 heures, soit environ la quantité qui tombe habituellement en trois ou quatre mois. À l'aéroport, il est tombé 32,2 cm de neige le 26 avril, établissant un record pour la journée, à 5 cm près du record absolu de chutes de neige de 1986. La pluie abondante et l'accumulation de neige mouillée ont provoqué des conditions désastreuses dans la ville et ses alentours, interrompant le fonctionnement de l'aéroport et bloquant les véhicules dans des amoncellements de neige et le long des bords de routes. Les branches d'arbres brisant sous le poids de la neige et les débris ont été emportés dans les rues par des vents violents alors que les communautés extérieures connaissaient des pannes d'électricité généralisées. Les services d'urgence ont répondu à un nombre record de 263 appels, soit 100 de plus que d'habitude. Le maire de Calgary a déclaré que c'était la pire tempête d'hiver en 100 ans. Les neiges printanières ont forcé les jardiniers et les golfeurs à rester à l'intérieur et ont annulé de nombreux matchs de soccer. Le principal sujet de conversation en ville était le mauvais temps.

Cependant, pour les fermiers et les éleveurs, la neige très mouillée valait son pesant d'or. Ils avaient exprimé auparavant leur inquiétude car les neiges d'hiver n'avaient pas pénétré la terre gelée. À présent, une seule tempête pouvait changer le cours de la sécheresse qui avait tourmenté l'agriculture en Alberta depuis quatre ans. La neige espérée, qui était une infusion humide substantielle, pouvait restaurer l'humidité du sol, combler les fossés et recharger les grands pâturages.

Les neiges abondantes n'étaient pas terminées pour les Prairies. Les chutes de neige au mois de mai ont représenté une aide d'un million de dollars pour les cultivateurs du centre et de l'Est de l'Alberta. À Calgary, il a neigé pendant huit jours d'affilée – du 2 au 9 mai. La neige printanière de la ville s'est élevée à 105 cm au total, par rapport à la norme de 47 cm, établissant un record pour le quatrième printemps le plus enneigé. Edmonton a reçu 32,4 cm de neige en mai, établissant un record pour le deuxième mois de mai le plus enneigé. Dans la capitale de l'Alberta, la chute de neige printanière totale a été de 99,4 cm (presque trois fois la quantité normale), soit un nouveau record.

10. Ère glaciaire à Badger

La ville de Badger (Terre-Neuve et Labrador ) connaît bien les inondations pour avoir été submergée au moins trois fois durant les 25 dernières années, mais rien ne peut être comparé à l'inondation glaciaire de 2003. À la mi-février et pendant une semaine ou plus, les Canadiens regardaient fixement des images spectaculaires de toits de voitures et de cabines de camions figés et d'une petite ville de Terre-Neuve et Labrador prise dans une couche de glace de taille colossale. Le désastre a débuté lorsqu'un embâcle majeur a provoqué le débordement des rivières Exploits, Red et Badger faisant jaillir les eaux à travers les rues de Badger et envahissant des centaines de foyers et de commerces. Le niveau de l'eau a grimpé de 2,5 m en une heure, laissant sans abri 1100 habitants de la ville. Un état d'urgence a été déclaré et la ville entière évacuée, plusieurs résidents trouvant un refuge dans des abris temporaires à Grand Falls-Windsor. Étant donné la rapidité de l'événement, ce fut un véritable miracle que personne n'ait été blessé.

Après l'inondation, la situation s'est aggravée en raison de vents violents, de neige balayée par le vent et de froid glacial. Pendant une semaine, les températures sont restées sous –20 °C, ensevelissant la majeure partie de la ville sous plus d'un mètre de glace. Les biens des résidents flottaient au gré de l'eau pendant un moment avant d'être saisis dans la glace. De grandes plaques de glace, d'un poids total d'environ 1,3 million de tonnes, se sont écrasées contre les fenêtres et les portes d'édifices et ont déformé les murs des résidences. Un chemin forestier a dû être construit en ville car les inondations avaient éliminé l'accès à la transcanadienne, elle-même été réduite à un chemin défoncé à une voie traversant la ville de Badger.

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