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Prévisions des émissions de gaz à effet de serre : Leçons tirées des pratiques exemplaires internationals

Le défi inhérent aux prévisions

Les défis inhérents à l’évaluation des réductions d’émissions à la suite des politiques et mesures climatiques sont bien documentés[10]. Du point de vue de la méthodologie, ils s’agit de l’élaboration d’hypothèses de base[11] et de l’impact de politiques et mesures particulières, d’hypothèses relatives aux coûts financiers et aux préférences des consommateurs, d’hypothèses sur l’orientation et le rythme des changements technologiques, du coût des interventions individuelles comparativement à des interventions intégrées, d’hypothèses sur les coûts macroéconomiques, l’effet des politiques et mesures sur l’incidence du coût et les coûts totaux de même que tous les coûts et avantages découlant des politiques de réduction des émissions de GES. Il n’existe aucune méthode simple de tenir compte de toutes ces interventions.

Les questions de gouvernance relatives à la prévision efficace des émissions sont probablement moins complexes, techniquement, mais tout aussi exigeantes. La Réponse de la TRNEE à ses obligations en vertu de la LMOPK - 2007 soulignait l’importance de la transparence et de la clarté à l’égard des principales hypothèses et méthodes et affirmait qu’il fallait tenir compte des sensibilités et des incertitudes. Elle soulignait également l’importance d’appliquer des méthodes cohérentes dans les différents ministères, programmes et mesures et la nécessité d’intégrer les résultats dans un cadre holistique. Ce rapport explorera la manière dont deux autres pays relèvent ces deux genres de défis et déterminera, autant que possible, s’il est approprié d’appliquer leur façon d’aborder la méthodologie et la gouvernance au contexte canadien.

3.1 Qu’est-ce qu’une prévision?

Dans ce rapport, le mot prévision se définit comme une représentation–un modèle économique–de la manière dont un système évoluera avec et sans l’intervention de politiques. Puisque le futur est bien sûr inconnu et par conséquent incertain, nous ne pouvons pas affirmer qu’une prévision faite aujourd’hui est meilleure qu’une autre. Toutefois, nous pouvons évaluer diverses méthodes de prévision par rapport aux critères suivants :

  1. l’exactitude passée, ce qui permet de présager de l’exactitude ou de l’inexactitude des prévisions futures;
  2. une saine représentation de la dynamique des systèmes courants et émergents[12], ce qui devrait améliorer la probabilité de préparer de meilleures prévisions;
  3. une plus grande transparence, ce qui permet à des tiers de mieux examiner et critiquer toutes les principales hypothèses, et peut-être, de tester des solutions de rechange;
  4. la capacité de mener des analyses de sensibilité et d’en consigner les résultats, ce qui devrait permettre de mieux comprendre les principales hypothèses d’un modèle de prévision et les incertitudes connexes.

3.2 Méthodes de modélisation

Les prévisions d’émissions sont calculées à l’aide de modèles écoénergétiques. Ces modèles sont conçus pour prévoir les effets des politiques sur les émissions de GES liées à l’énergie. La structure de la plupart des méthodes de modélisation écoénergétiques va des modèles ascendants détaillés, reflétant les détails techno-économiques d’une vaste gamme de technologies dans chaque secteur, aux modèles descendants englobant l’ensemble de l’économie et calibrés sur les données historiques provenant des centaines de secteurs. Les modèles hybrides–qui combinent la force des modèles ascendants et descendants–sont considérés par plusieurs autorités en modélisation comme des méthodes de prévision optimales[13]. Le modèle E3[14] du Canada est un exemple de ce modèle hybride, de même que le modèle Energy Information Administration (EIA) des É.-U. (décrit dans la section 4.4.2)[15]. Plus loin dans ce rapport, lors de l’examen des pratiques exemplaires de pays particuliers concernant les méthodes de prévision des émissions, nous évaluerons les genres de conclusions pouvant être tirées quant à l’efficacité des prévisions élaborées avec les diverses méthodes de modélisation utilisées.


10 Exemples : Jaccard, M., J. Nyboer et B. Sadownik, The Cost of Climate Policy (2002); Bernstein, S., International institutions and the framing of domestic policies: The Kyoto Protocol and Canada’s response to climate change, Policy Sciences, 35 (2002); et Nordhaus, R. et K. Danish, Designing a mandatory greenhouse gas reduction program for the U.S. (2003).

11 À tout le moins, des hypothèses de base doivent comprendre des données justificatives et les données doivent être cohérentes avec celles des autres organismes.

12 Dans ce cas, la dynamique des systèmes se rapporte à la façon dont un modèle écoénergétique tient compte des changements en matière de technologies, de coûts et de comportement au fil du temps.

13 Dowlatabadi, H., D.R. Boyd, J. MacDonald (2004). Model, Model on the Screen, What’s the Cost of Going Green? Washington, D.C.: Resources for the Future, p. 10.

14 E3 est le modèle énergie-émissions-économie du Canada. Sa description figure à la section 4.3.1.

15 Prière de consulter l’annexe A pour un exposé sur les méthodes de modélisation.

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